06/11/2025
🌐Sur les réseaux sociaux, circulent de plus en plus de photographies de jeunes hommes, torses nus et bras croisés, posant devant des drapeaux ornés de symboles runiques ou celtiques. Ces images ne relèvent pas de simples clubs de sport, elles proviennent d’un réseau transnational d’extrême droite, connu sous le nom d’Active Clubs.
💪Sous des apparences anodines, comme la promotion du bien-être, l'appels à devenir "la meilleure version de soi-même", ces groupes mêlent nationalisme blanc, camaraderie viriliste et idéologie accélérationniste. Leur credo : forger des corps forts et disciplinés pour préparer une guerre raciale et participer à la "reconquête" d’une prétendue civilisation occidentale en déclin.
➡️Ce texte est une présentation de la recherche de Frédérick Nadeau, Tristan Boursier et Isaac Gnocchini. Vous pouvez retrouver le lien vers leurs travaux en commentaire.
🥊Les Active Clubs
💥Les Active Clubs sont nés aux États-Unis, inspirés par le Rise Above Movement (RAM), fondé en 2017 par Robert Rundo, militant néonazi californien. Exilé en Roumanie, Rundo a imaginé un modèle d’organisation décentralisée, des cellules locales autonomes remplaçant les structures hiérarchiques traditionnelles, plus faciles à surveiller ou à dissoudre.
📈Aujourd’hui, le réseau s’étend du Canada à l’Europe, jusqu’à l’Australie. Selon le Global Project Against Hate and Extremism, le nombre de clubs a augmenté de 25% depuis 2023, atteignant 187 groupes répartis dans 27 pays.
❓Quelles idéologies?
🥋Dans ce modèle, la pratique sportive devient un vecteur de radicalisation. Les séances d’entraînement collectif, les randonnées et les combats à mains nues sont mis en avant dans les publications des Active Clubs. Ces activités visent à créer une solidarité fondée sur la discipline, l’effort et la loyauté.
👊Le corps musclé, endurant, prêt au combat, devient le symbole d’un ordre moral et racial à restaurer. Les contenus diffusés sur Telegram traduisent également l’influence de la pensée accélérationniste, qui prône l’effondrement volontaire des sociétés libérales afin de permettre la "renaissance" d’une civilisation blanche. Ces milliers de publications participent à l’édification d’une culture visuelle unifiée, séduisante et globalisée, qui redéfinit le nationalisme blanc à l’ère numérique.
🤼Politiser le corps
💬Les messages partagés par les Active Clubs soulignent l’importance de la rigueur, de la virilité et de la fraternité. "Nous rejetons la faiblesse, la passivité et la décadence de notre époque. Par l’entraînement, la discipline et l’épreuve partagée, nous devenons plus forts – individuellement et collectivement".
🧐Ce discours illustre ce que les auteurs appellent l’engagement corporel : une forme d’incarnation politique, où les convictions se traduisent dans le mode de vie, l’apparence et les pratiques quotidiennes. Le militantisme s’exprime ainsi à travers le corps.
🦵Cette approche donne à l’idéologie une dimension sensible et émotionnelle, rendant la radicalisation expérientielle. On ne se contente pas d’adhérer à une idée, on la vit et on la performe. Cela explique l’attrait du mouvement auprès de jeunes hommes en quête de sens, de communauté et de modèles masculins.
🦸♂️Contrairement aux groupes ouvertement politiques, les Active Clubs investissent des espaces du quotidien. Leurs membres se montrent en train de s’entraîner, de faire du bénévolat ou de nettoyer des lieux publics. Ces activités deviennent des rituels de socialisation et offrent une image de respectabilité.
🤥Mais derrière cette façade parfois "bienveillante" se cache un processus de politisation: les discours opposent sans cesse les "forts", sains, disciplinés aux "faibles", perçus comme des "parasites" d’une société "décadente". Ces images nourrissent un sentiment d’appartenance fondé sur la fierté d’être du "bon côté", celui des purs et des éveillés.
😈L'extrême droite sous le masque du bien-être
😵La dangerosité des Active Clubs réside dans leur capacité à détourner les codes du bien-être et du développement personnel au profit d’une idéologie d'extrême droite. En valorisant la santé, la fraternité et la discipline, ils esthétisent la violence qui devient une vertu morale plutôt qu’un acte répréhensible. Là où les groupes traditionnels affichaient une brutalité frontale, les Active Clubs transforment cette violence en symbole de loyauté, d’honneur et de force morale.
🚴♂️Ce brouillage esthétique rend la radicalité attractive et légitime, car elle s’exprime à travers des valeurs positives (courage, dépassement de soi, camaraderie). En adoptant les codes du développement personnel, ces groupes rendent l'extrême droite désirable et compatible avec la culture dominante du bien-être et de la performance individuelle.
🔻Ainsi, la lutte contre l'extrême droite s’étend désormais aussi aux gyms, aux stories Instagram et aux podcasts de motivation. En fusionnant culte du corps et idéologie nationaliste, les Active Clubs participent à la banalisation de l’extrême droite. Ils traduisent ses valeurs (hiérarchie, pureté, virilisme) dans le langage du développement personnel, produisant un nationalisme blanc diffus, culturel et insidieux.