11/19/2025
Haïti : 18 Novembre : De Vertières à la Pelouse une même victoire, deux Siècles plus t**d
En Haïti, le 18 novembre n’est jamais un jour comme les autres. La date du 18 Novembre porte la mémoire d’un peuple qui, en 1803, fit trembler l’ordre mondial en infligeant à l’armée napoléonienne, la plus grande de l’époque, une défaite cuisante à Vertières. Aujourd’hui, 222 ans plus t**d, cette date se charge d’un nouvel éclat : celui de la qualification de la sélection haïtienne de football, arrachée avec détermination ce mardi 18 novembre 2025, à Curaçao, en dépit de l’indisponibilité du mythique stade Sylvio Cator, où Haïti aura été intraitable.
En 1803, l’armée indigène, menée par les généraux Jean-Jacques Dessalines, Capois-La-Mort et leurs frères d’armes, fit vaciller ce qui était alors considéré comme la force militaire la plus puissante de la planète. À Vertières, les bataillons se battant sous la férule de notre Libérateur, Jean-Jacques Dessalines, se sont révélés impitoyables lors de l’ultime bataille à Vertieres.
En dépit d’un climat national marqué par une insécurité galopante, où le banditisme impose son rythme à la vie quotidienne et où les vols internationaux vers Port-au-Prince demeurent suspendus, Haïti vient d’accomplir ce que beaucoup jugeaient impossible. Dans un pays où le football, autrefois ciment de l’unité populaire, est aujourd’hui presque à l’arrêt, les Grenadiers ont pourtant réussi à racheter leur qualification pour la prochaine Coupe du monde, prévue aux États-Unis, au Canada et au Mexique, en été prochain. Cette performance, obtenue dans un contexte de paralysie sportive et institutionnelle, résonne comme un acte de résistance. Elle rappelle le rôle historique du football comme source d’espérance collective, capable de transcender les frontières du chaos et de ramener la nation, ne serait-ce qu’un instant, vers un sentiment de fierté partagée.
Sur le plan économique, le pays traverse l’une des périodes les plus sombres de son histoire contemporaine. Le produit intérieur brut (PIB) stagne, les investissements se font rares et les coûts de la vie montent en flèche, et près de quatre millions d’Haïtiens vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté. Dans ce décor de fragilité extrême, la qualification pour le Mondial prend des allures de paradoxe national. Comment une nation éprouvée, privée de moyens, aux infrastructures sportives délabrées, peut-elle réussir un tel exploit ? Pour beaucoup d’observateurs, cette prouesse illustre non seulement la détermination des joueurs et du staff, mais aussi la résilience de ce peuple, toujours prêt à se relever malgré les tempêtes successives.
Au-delà du terrain sportif, cette performance ouvre un espace de réflexion. Elle interroge sur la capacité du football à demeurer un vecteur de cohésion dans des moments de crise profonde. Elle suscite également un débat sur la place du sport dans la reconstruction nationale, à l’heure où la population réclame davantage de stabilité, de sécurité et d’opportunités économiques. Mais pour l’instant, cette qualification offre à la nation un rare moment d’unité et de célébration, semblable aux grandes heures de 1974, - sous la houlette de l’entraineur Antoine Tassy-, lorsque Manno Sanon avait mis fin à l’invincibilité du légendaire Dino Zoff. Aujourd’hui comme hier, le football vient rappeler qu’Haïti, malgré les épreuves, reste capable d’écrire des pages de légende. Et voilà, 222 ans après le combat de Vertieres, c’est un français du nom de Sébastien Migné qui conduit Haïti en coupe du monde. Haïti reste et demeure un pays unique et mythique, malgré ses déboires.
Haïti au Mondial 2026 : l’exploit d’une nation qui refuse de tomber
Dans un pays où les stades sont restés silencieux, où aucun match n’a pu se jouer sur le sol national à cause d’une insécurité dévastatrice, la qualification de la sélection haïtienne pour la Coupe du monde 2026 résonne comme un séisme d’espoir. Privés du soutien direct de leur public, contraints à l’errance sportive, les Grenadiers ont pourtant réussi l’un des plus grands exploits de l’histoire contemporaine du football haïtien. Cette qualification n’est pas seulement un ticket pour le Mondial ; elle est un acte de résistance, un miracle sportif né au cœur d’un pays qui lutte chaque jour pour respirer. À l’heure où les ombres semblent étendre leur emprise sur la vie nationale, les Grenadiers ont rallumé une lumière que beaucoup croyaient éteinte : celle de la fierté, de la résilience et de la possibilité d’un avenir meilleur.
Un exploit arraché dans le chaos
Depuis plus de quatre ans, Haïti vit un effondrement sécuritaire qui a paralysé la quasi-totalité de ses activités, dont le sport. Avec des infrastructures abandonnées, des compétitions nationales interrompues et l’impossibilité d’accueillir des rencontres internationales, la sélection a dû se forger loin de ses bases, loin de ses supporters, dans des stades étrangers où retentissaient rarement les chants et cris familiers du pays.
Et pourtant, malgré cet exil imposé, malgré la peur, malgré les obstacles humains et autres, les Grenadiers ont su tenir tête. Ils ont construit leur qualification à la force de caractère, match après match, comme on pousse une pierre. Pour les joueurs, chaque rencontre représentait plus qu’un duel sportif : c’était un engagement moral envers un peuple qui garde les yeux rivés sur ses héros.
Pour la diaspora, qui suit avec émotion les pas de l’équipe, cette qualification offre un rare moment d’unité. Pour les jeunes du pays, elle incarne une promesse : même lorsque le sol tremble, même lorsque les rêves semblent enfuis dans les entrailles de la misère et du désespoir, la population broie du noir, l’effort collectif peut ouvrir des brèches de lumière.
Un pays en crise, mais debout
Les défis auxquels Haïti est confrontée demeurent immenses : insécurité persistante, effondrement institutionnel, crise économique étouffante. Le football n’échappe pas à cette réalité. Pourtant, la performance des Grenadiers rappelle que la nation possède encore des réserves de courage et de dignité. Lè ayisyen konprann sa dyaspora li ya reprezante pou peyi a, e byen , nou prale lwen.
Une qualification d’expatriés
Sur les ondes de radio Caraïbes, ce mercredi matin, Phillipe Vorbe, passeur de Manno Sanon en 1974, Munich, explique que la magnitude de cette qualification est qu’Haïti joue tous ses matchs qualificatifs à l’extérieur. Fait singulier et profondément symbolique : la majorité des joueurs qui ont offert à Haïti son billet pour la Coupe du monde 2026 sont nés hors du pays. Ils portent des noms créoles, des racines haïtiennes, mais n’ont jamais foulé la terre de leurs ancêtres, souvent en raison de l’insécurité persistante. Pourtant, c’est avec un attachement viscéral à une nation qu’ils connaissent surtout par les récits familiaux, par la mémoire transmise et par l’héritage du sang, qu’ils ont répondu présents. Leur engagement rappelle qu’Haïti possède une force rare : celle de rassembler ses enfants, où qu’ils soient dans le monde, autour d’un même idéal de fierté et de renaissance. Voilà l’histoire d’un pays unique, d’une diaspora unique, et d’un héritage qui dépasse les frontières comme les épreuves.
A l’impossible, Haïti est tenu
La qualification pour le Mondial ne résout pas les crises du pays. Mais elle offre quelque chose d’inestimable dans les périodes sombres : un souffle. Un symbole. Une raison de croire que l’impossible peut devenir possible, tout n’est pas perdu. Cela requiert un sursaut national, pour donner au pays une nouvelle impulsion. Le sport représente un pôle économique sûr pouvant contribuer au développement du pays meurtri, avili, exploité, humilié. A cette phase, l’intellectuel et chroniqueur sportif, Frantz Exil, au micro de Thomas Rudy Sanon, à l’émission ‘’ se sa nou vle ‘’, en appelle à la mobilisation de toutes les entités : l’État, la Fédération haïtienne de Foot ball, la diaspora haïtienne pour permettre à la sélection d’avoir une préparation sur mesure en vue du Mondial de 2026. De poursuivre, monsieur Exil souligne qu’un montant de quatre millions de dollars serait suffisant pour la préparation de la sélection.
En 2026, sur les pelouses nord-américaines, les couleurs d’Haïti flotteront à nouveau parmi les géants du football mondial. Les Grenadiers n’iront pas seulement représenter une équipe : ils porteront dans leurs pas un peuple entier, ses douleurs, ses luttes, mais surtout sa volonté inflexible de se tenir debout malgré les tempêtes. Et lorsque retentira l’hymne national, ce ne seront pas seulement onze joueurs qui chanteront. Ce sera toute une nation — blessée, mais vivante ; meurtrie, mais indomptable — qui retrouvera sa place sous la lumière du monde. Ayiti se wozo, menm si li pliye, men li pap kase
Jean Hérode Févrius
19 Novembre 2025
