HAM/CSAC

HAM/CSAC Base pour un panafricanisme porteur de développement par la croissance et l'amélioration de la qualité de vie

11/07/2025

“COURBETTES A LA MAISON BLANCHE” OU DIPLOMATIE INDIGENTE ? POUR UNE REFONDATION DE LA POSTURE AFRICAINE SUR LA SCENE INTERNATIONALE

Par

Professeur Dédé Watchiba

Introduction : une photo de trop ?

La photographie a circulé abondamment sur les réseaux sociaux : Donald Trump, souriant, assis au centre du Bureau ovale, entouré de cinq chefs d’État africain, debout, visiblement mal à l’aise, en retrait. L’image a suscité une vague d’indignation, certains y voyant l’illustration crue d’un rapport déséquilibré, presque féodal.

Plus qu’une question de protocole, cette scène traduit une crise plus profonde, celle de la dignité diplomatique africaine. À travers les propos condescendants de Trump, les réactions parfois obséquieuses des chefs d’État africains et la scénographie même de la rencontre, s’est rejouée une séquence tristement familière de dépendance symbolique et stratégique.

Cette réflexion interroge les racines de cette posture, ses implications pour les jeunesses africaines, et propose des pistes pour une refondation de la diplomatie africaine sur la base de la gouvernance, de la souveraineté et de la dignité.

I. Une diplomatie du minéral : de la souveraineté au marketing extractiviste

La rencontre du 9 juillet 2025 à la Maison Blanche a été présentée comme une opportunité de valoriser le potentiel économique des cinq pays représentés (Mauritanie, Gabon, Sénégal, Libéria, Guinée-Bissau). Mais les discours prononcés par leurs dirigeants ont surtout révélé une logique mercantile étroite : vendre le sous-sol national au plus offrant. De l’uranium mauritanien au gaz sénégalais, en passant par le lithium, la bauxite ou encore les terres rares, les chefs d’État ont agi comme des agents commerciaux, parfois avec une rhétorique déconcertante jusqu’à suggérer à Trump d’investir dans un club de golf à Dakar.

Ce tournant transactionnel, encouragé par Trump qui a explicitement affirmé passer « de l’aide au commerce », n’est pas illégitime en soi. Mais la mise en scène et le contenu des échanges révèlent une asymétrie de pouvoir. Les États africains n’ont pas présenté une vision souveraine de leur développement, fondée sur la transformation locale des ressources ou sur des partenariats équilibrés. Ils ont plutôt cherché à séduire, à rassurer, à plaire, à tout prix. Or, la diplomatie ne peut être réduite à une opération de charme minéralogique.

II. Humiliations feutrées et mépris diplomatique : entre naïveté et résignation

Les remarques de Trump lors de cette rencontre relèvent moins du folklore que d’un discours problématique, porteur de relents paternalistes. Le président américain s’émerveille publiquement du niveau d’anglais du président libérien (« c’est un bel anglais ! Où avez-vous appris ? »), feint la surprise face à l’apparence juvénile du président sénégalais (« Vous avez l’air jeune… »), et interrompt sèchement le président mauritanien en lui lançant : « Soyez bref, allez droit au but. »

Ces propos ne sont pas anodins. Ils révèlent une perception biaisée et hiérarchisante des relations internationales, où l’Afrique apparaît comme une entité à contenir, séduire ou instrumentaliser, mais rarement à écouter en tant que partenaire stratégique. Le fait que certains chefs d’État aient, dans la même séquence, proposé Trump pour un Prix Nobel de la paix ne fait qu’amplifier le malaise. Il est le symptôme d’un tropisme ancien et dangereux, celui de la dépendance symbolique à l’Occident comme garant de la légitimité et de la réussite politique.

III. Le syndrome de la diplomatie de la mendicité

Le cœur du problème n’est pas la rencontre elle-même, ni même l’intérêt africain pour des partenariats économiques. Il réside dans la posture adoptée. Loin de porter une vision africaine de la coopération internationale, les cinq dirigeants ont incarné ce que l’on pourrait appeler une diplomatie de la mendicité, marquée par un déficit de souveraineté, une quête effrénée de validation extérieure, et une capacité limitée à négocier à partir d’une base stratégique propre.

Cette attitude trouve ses racines dans une gouvernance continentale encore trop dépendante de l’extérieur, peu soucieuse d’auto-détermination, et trop souvent préoccupée par la conservation du pouvoir plutôt que la transformation structurelle des sociétés. À cela s’ajoute une faiblesse chronique des institutions panafricaines, incapables d’offrir une voix collective, digne et respectée face aux grandes puissances.

IV. Restaurer la dignité africaine : gouvernance, souveraineté et leadership transformateur

La dignité diplomatique de l’Afrique ne se décrète pas, elle se construit. Elle suppose d’abord une révolution de la gouvernance interne. Aucun continent ne peut prétendre à la souveraineté s’il ne garantit à ses populations un minimum de justice sociale, de services publics dignes, et de perspectives économiques. Un continent où les élites politiques s’exilent pour se soigner, éduquer leurs enfants ou placer leurs avoirs, perd d’avance toute crédibilité à parler d’égalité entre États.

Ensuite, il faut refonder le leadership africain sur des bases éthiques et stratégiques. Il est temps de passer d’une diplomatie d’appoint à une diplomatie de proposition ; de chefs d’État “en représentation” à des dirigeants porteurs d’agendas structurants. Cela implique de se doter d’une doctrine africaine des relations internationales, cohérente, assumée et affirmée, au-delà des jeux d’allégeance et de survie politique.

Enfin, la jeunesse africaine doit être au cœur de ce sursaut. Elle a besoin de leaders capables d’incarner la fierté, la compétence et l’ambition du continent. Des leaders qui inspirent, plutôt que de donner le spectacle d’un continent à genoux.

Conclusion : “L’Afrique n’est pas un mendiant du monde”

Ce qui s’est joué à Washington est plus qu’une rencontre diplomatique ; c’est le miroir d’une Afrique encore à la croisée des chemins. Soit elle persiste dans une dépendance résignée et symboliquement mutilante, soit elle s’engage résolument dans la voie de la souveraineté, de la gouvernance responsable et de la diplomatie digne.

Il ne s’agit pas de refuser les partenariats. Il s’agit de les négocier avec lucidité, sur la base des intérêts réciproques, et dans le respect des peuples. Car la jeunesse africaine regarde. Elle juge. Et elle attend, avec impatience, une génération de dirigeants capables de faire mentir cette image d’un continent qui courbe l’échine là où il devrait se tenir debout.

Pour une analyse plus approfondie des dynamiques de domination symbolique dans les relations internationales et des pistes concrètes pour restaurer une diplomatie africaine souveraine, je vous invité à consulter l’ouvrage « Le Monde de demain – Regards croisés sur le nouvel équilibre géopolitique mondial » (Dédé Watchiba, Éditions Generis, 2024)

🇨🇩 ACCORD DE PAIX DE WASHINGTONPar Germain Mbeku Ikanga Etant très présent dans les réseaux sociaux, j’assiste à presque...
07/07/2025

🇨🇩 ACCORD DE PAIX DE WASHINGTON
Par Germain Mbeku Ikanga

Etant très présent dans les réseaux sociaux, j’assiste à presque tous les échanges entre nos éminents hommes politiques au sujet de l’accord de paix de Washington que la RDC, notre pays, vient de signer avec le Rwanda et les USA, le 27 juin dernier.
Je considère qu’au lieu de nous lancer des quolibets, nous devons plutôt nous dire que le vin est tiré, il faut le boire.
Je trouve que certaines observations que les uns et les autres avancent auraient été évitées dans le choix de délégués dépêchés à Washington pour négocier les termes de l’accord avant sa signature. D’autres personnes pensent certainement comme moi, mais par solidarité politique, ils préfèrent rester sur leur réserve.

Par là, je ne mets nullement en doute la compétence de membres de cette délégation, bien au contraire, je trouve d’ailleurs que Madame Thérèse Kayikwamba Wagner a dirigé cette équipe de main de maître. Néanmoins, je me demande si la présence des éléments comme Christophe Lutundula et Shé Okitundu, à l’Union Sacré de la Nation, n’auraient-ils pas été plus utile pour l’équipe et pour la Nation ? Le choix que le Maréchal Mobutu avait opéré pour le débat de clarification avec la presse belge, en désignant Maître Kamanda wa Kamanda, Professeur Mpinga Kasenda et Maître Nimy Maidikangimbi pouvait nous servir d’exemple, bien que le problème soit d’une autre nature. Le bon choix des hommes porte une partie de solution au problème.
Pour ce qui concerne cet accord, je me répète, le vin est tiré, il faut le voir.

Je considère que pour le mental des partenaires dans cet accord, la RDC y est allée en position de faiblesse, celle de quelqu’un qui a perdu la guerre, même si une certaine opinion ne veut pas l’admettre. Les deux chefs-lieux de province, du Nord et Sud-Kivu, sont entre les mains du Rwanda et de l’AFC/M23. D’où, cette attitude de condescendance des vainqueurs qui imposent la loi aux vaincus.
A l’issue de la guerre de 39-45, les Alliés ont appliqué sur l’Allemagne cette loi des vainqueurs. Mais aujourd’hui, cela n’a pas empêché à l’Allemagne d’être la première puissance de l’Europe.

C’est là que je considère que les USA nous ont tendu la perche en nous associant à la signature de l’accord de paix, au regard de notre situation militaire et sécuritaire. Nous ne perdons pas tout dans cet accord, car notre force, c’est de devoir appliquer notre loi minière qui réglemente l’exploitation minière dans notre pays. Nulle part, l’accord n’abroge la loi minière de la RDC.
Toutes les sociétés minières, coopératives d’exploitation ou autres doivent se soumettre à nos lois en ce qu’elles prévoient le contrôle des produits par les structures congolaises, les formalités d’exploitation et d’exportation. Etre partenaire dans l’accord ne vous exonère pas de vos obligations légales.
Or, dans le mental de nos partenaires rwandais, après l’accord sera comme avant l’accord. C’est-à-dire dans les bonnes traditions congolaises, chaque Rwandais ou chaque société rwandaise aura son Général, son Ministre… pour s’occuper des activités en RDC au point l’agent congolais va faciliter les minerais en fraude jusqu’au Rwanda.

C’est maintenant que nous devons nous montrer sérieux dans l’application de nos lois pour que la population puisse profiter tant soit peu de ses richesses. Les obligations sociales telles que prévues par la loi minière doivent être respectées par les sociétés qui exploitent en RDC.
Autre chose, depuis 1982, le Gouvernement a libéralisé l’exploitation de l’or au pays. Il a aussi autorisé le transport de l’or à l’intérieur du pays. Pour recueillir l’or ainsi exploité par les exploitants artisanaux, le Gouvernement avait autorisé le fonctionnement des comptoirs d’achat d’or. La Banque Centrale avait, à cette occasion, ouvert une direction d’achat d’or. La Banque communiquait journellement les produits achetés dans les comptoirs d’achats d’or.
La population n’a pas arrêté les activités d’exploitation des minerais. Nous ne nous interrogeons pas de la destination que prend cette production depuis 1997 que les comptoirs d’achats d’or n’existent plus ?
Voilà une des dispositions à prendre pour que la RDC puisse profiter de ses minerais à la faveur de cet accord.

Enfin, les Interamwe, parlons-en. C’est le cafard qui a pourrit la vie des gens dans le Grand Kivu. Pour faciliter à Paul Kagame d’assoir son autorité sur le Rwanda, la Communauté internationale avait demandé à Mobutu d’ouvrir les frontières de son pays pour installer ces interamwe. Le Premier Ministre Kengo wa Dondo a résolu de les renvoyer chez eux. Le Secrétaire Général de l’ONU de l’époque, Boutros Boutros Ghali, était intervenu pour ne pas passer à cette opération, ces réfugiés devaient rentrer chez eux en toute dignité ; cette dignité nous a couté très chère. C’est comme le Sage lega qui parle ‘’des testicules qui se transforment en hernie’’.

A quoi ces effectifs résiduels s’occupent-ils ? généralement à exploiter les minerais. A qui les vendent-ils ? Au Rwanda qui les qualifie de forces négatives. Le dindon de la farce dans cette affaire, c’est la République Démocratique du Congo. Nous devrions profiter de cet accord pour assainir cette situation des Interamwe qui nous a pourrit la vie voilà trente ans maintenant.

07/07/2025

Tiré d'un mur sans mentionner l'auteur de cette réflexion interpellatrice pour un pays qui rejette l'intelligence.

La faiblesse d’un pays commence là où l’intelligence se couche devant l’émotion.

Quand les intellectuels congolais, ceux censés être la conscience critique de la nation confondent fanatisme et patriotisme, alors le pays n’a plus de garde-fous. Le patriotisme, c’est l’amour lucide de sa patrie, la capacité de critiquer pour corriger, de dénoncer pour améliorer. Le fanatisme, c’est le refus de voir les évidences, la soumission aveugle aux slogans et aux figures qu’on érige en idoles intouchables. Quand la majorité de ceux qui détiennent les outils de pensée choisissent de flatter le pouvoir ou de se taire, alors la faillite morale devient nationale.

En RDC, trop d’intellectuels sont devenus des courtisans, des narrateurs de propagande, ou des philosophes de salon dont les réflexions ne dépassent pas la surface des réseaux sociaux. Ils se battent pour des postes, des privilèges, ou la reconnaissance de ceux qu’ils devraient interroger. Ils ne pensent plus pour éclairer, mais pour plaire. Et pendant ce temps, le peuple s’enfonce dans la misère, abandonné à l’incurie de ses élites.

Quant à la classe politique , et plus gravement encore l'exécutif national , elle peine à poser des diagnostics précis. Le mal congolais est souvent mal nommé, mal compris, donc mal combattu. On applique des pansements sur des plaies gangrenées, on célèbre des réformes cosmétiques là où il faudrait des ruptures structurelles. L’exécutif gouverne comme s’il dirigeait une province tranquille, pas une nation en crise chronique.

Résultat : nous avançons dans le brouillard, sans cap, sans boussole, avec des passagers qui chantent pendant que le navire prend l’eau.

Le rôle de l’intellectuel n’est pas de plaire, ni de protéger le confort de ceux qui dominent. Il est d’alerter, de déranger, de forcer le débat. Tant que les intellectuels congolais ne reprendront pas leur rôle de vigies, tant que leur parole restera liée aux agendas politiques, aux ethnies ou aux ambitions personnelles, le Congo

POURQUOI LES PRESIDENTS AFRICAINS NE VEULENT PAS PARTIR : ANALYSE MULTIDIMENSIONNELLE DU PHENOMENE DES CHEFS D’ÉTAT AFRI...
06/07/2025

POURQUOI LES PRESIDENTS AFRICAINS NE VEULENT PAS PARTIR : ANALYSE MULTIDIMENSIONNELLE DU PHENOMENE DES CHEFS D’ÉTAT AFRICAINS AU POUVOIR DEPUIS PLUS DE 30 ANS

Par

Professeur Dédé Watchiba

Alors que la démocratie post-guerre froide a suscité l’espoir d’un renouveau politique sur le continent africain, une résurgence préoccupante d’un phénomène ancien vient assombrir les perspectives d’alternance et de modernisation des institutions : la longévité anormale au pouvoir de certains chefs d’État africains.

De Teodoro Obiang Nguema Basongo à la tête de la Guinée équatoriale depuis 1979 à Paul Biya au Cameroun (au pouvoir depuis 1982), en passant par Denis Sassou Nguesso au Congo-Brazzaville, Ismaël Omar Guelleh à Djibouti, Isaias Aferweki en Érythrée (depuis 1993) ou encore Paul Kagame au Rwanda, nombreux sont ceux qui confisquent les mécanismes de succession au profit d’un pouvoir personnel, souvent constitutionnellement verrouillé.

Ce phénomène n’est pas simplement un caprice autocratique ; il reflète une combinaison de facteurs psychologiques, structurels, institutionnels, managériaux et sociologiques, dont les effets cumulatifs fragilisent le tissu démocratique et entravent le développement de l’Afrique.

I. Psychologie politique de la longévité : entre syndrome messianique et obsession du contrôle

La psychologie politique offre un angle d’analyse important. Beaucoup de ces dirigeants développent un « complexe du sauveur » ou une illusion de mission éternelle, convaincus que leur départ plongerait le pays dans le chaos. Ce syndrome messianique se double souvent d’une peur viscérale de la reddition de comptes post-mandat.

La paranoïa politique, alimentée par des entourages serviles, génère une hyper-centralisation des décisions, une criminalisation de l’opposition, et un effacement progressif des contre-pouvoirs. Museveni, après avoir promis qu’il ne resterait pas éternellement, modifie à deux reprises la Constitution pour étendre son règne. Paul Biya, retiré de la scène publique pendant de longues périodes, conserve le pouvoir grâce à une bureaucratie paralysée et une élite politique cadenassée.

II. Institutions verrouillées et peuples résignés : Anatomie d’un pouvoir captif

Le verrouillage constitutionnel et institutionnel constitue une pièce maîtresse du maintien prolongé au pouvoir de certains chefs d’État africains. À force de révisions opportunistes des Constitutions, d’affaiblissement des cours constitutionnelles, de neutralisation des parlements et d’instrumentalisation des commissions électorales, les régimes concernés transforment les mécanismes de régulation démocratique en simples instruments de légitimation autoritaire. Les institutions, censées garantir l’alternance et le contrôle du pouvoir, deviennent des coquilles vides, vidées de leur substance. Dans un tel contexte, les principes du Nouveau Management Public — fondés sur la transparence, la performance et la responsabilisation — deviennent inapplicables. Les nominations, souvent basées sur la fidélité personnelle plutôt que sur les compétences, étouffent toute dynamique de réforme ou d’innovation. L’absence de culture de l’évaluation et de la redevabilité institutionnelle renforce ce cercle vicieux d’immobilisme politique.

Mais ce verrouillage ne tiendrait pas sans une forme de résignation sociale savamment entretenue. Le soutien affiché à ces régimes ne reflète pas toujours une adhésion réelle ; il résulte souvent de campagnes orchestrées, alimentées par la peur, la précarité, ou encore l’ethnicisation du politique. Dans des pays comme l’Ouganda ou le Cameroun, les jeunes, majoritaires dans la population, se sentent exclus du jeu politique et condamnés à observer la confiscation de leur avenir. Oscillant entre indifférence, exil et révolte contenue, ils incarnent une frustration générationnelle profonde. Là où près de 60 % de la population a moins de 25 ans, le maintien d’élites au pouvoir depuis quatre décennies apparaît comme un anachronisme tragique.

Pourtant, cette jeunesse n’a pas le droit de se résigner. Elle doit être la clé de voûte du changement, non seulement en raison de sa démographie écrasante, mais surtout par sa capacité à incarner une vision nouvelle de la gouvernance, ancrée dans les valeurs de justice, de participation, et de responsabilité. La sociologie politique met ainsi en lumière un divorce croissant entre gouvernants et gouvernés ; ceux qui tiennent les rênes du pouvoir refusent de quitter le passé, tandis que ceux qui incarnent l’avenir n’ont pas encore les moyens de le construire. C’est précisément à cette croisée des chemins que l’éveil citoyen de la jeunesse peut faire basculer l’histoire.

III. Impact sur les politiques publiques et la gouvernance

Un État dirigé par un même individu pendant plusieurs décennies tend à reproduire des politiques publiques figées, souvent déconnectées des réalités sociales. Les priorités sont orientées vers la sécurisation du régime plutôt que vers les services publics ou l’innovation. La corruption devient systémique, les institutions de contrôle étant instrumentalisées pour frapper les adversaires ou protéger les fidèles. Dans ce contexte, le développement devient illusoire. Le re**rd dans les infrastructures, l’éducation ou la santé publique est criant, malgré des décennies de promesses. Comme le souligne David Lewis Rubongoya en Ouganda, « la frustration des jeunes est liée à la pauvreté, au chômage et à la corruption ».

IV. Menace sur la stabilité politique régionale et la diplomatie africaine

Au-delà de leurs frontières, ces régimes autoritaires contribuent à l’instabilité régionale. D’une part, leur obsession de se maintenir au pouvoir à tout prix les pousse à instrumentaliser les conflits, comme l’a illustré le soutien présumé de certains régimes à des groupes armés dans les Grands Lacs. D’autre part, la décrédibilisation de leur autorité rend toute médiation régionale inefficace : comment imaginer qu’un président octogénaire, impopulaire et contesté chez lui, soit un arbitre neutre entre deux pays en conflit ? L’Afrique doit désormais recourir à des médiateurs extérieurs (USA, Qatar) pour résoudre ses propres crises. Cette perte d’autonomie stratégique est symptomatique d’une gouvernance désuète.

V. Dégradation de l’image des Africains à l’international et sentiment d’humiliation

Ce phénomène de confiscation du pouvoir affecte aussi la dignité et la fierté des Africains à l’échelle mondiale. Les vidéos virales montrant des Africains pourchassés, refoulés ou humiliés aux frontières américaines ou européennes sont les symptômes d’un mal plus profond : celui de systèmes politiques inefficaces, qui forcent la jeunesse à l’exil. Un continent riche en ressources humaines et naturelles continue d’être associé à la misère, aux dictatures et à l’instabilité. Tant que les États africains ne se doteront pas d’institutions fortes, d’alternances crédibles et de gouvernances centrées sur l’intérêt général, la fuite des cerveaux et le discrédit international persisteront.

VII. L’urgence d’un tournant : vers des systèmes politiques impersonnels et responsables

L’Afrique ne peut prétendre à un avenir politique stable et à un développement durable tant qu’elle demeure prisonnière de logiques de pouvoir fondées sur la personnalisation extrême des institutions. La concentration prolongée du pouvoir entre les mains d’un seul homme engendre non seulement des blocages institutionnels, mais elle alimente aussi des crises de légitimité récurrentes, une gouvernance arbitraire, et un affaissement de la culture démocratique. Il est aujourd’hui impératif de rompre avec cette tradition délétère et d’opérer un véritable tournant vers des systèmes politiques impersonnels, où le pouvoir ne repose plus sur la figure d’un individu, mais sur la force des institutions, la primauté du droit et l’État de droit.

Ce changement structurel suppose d’abord une limitation stricte des mandats présidentiels, non comme une clause décorative, mais comme une norme intangible du fonctionnement démocratique. Là où les Constitutions sont régulièrement manipulées pour servir des ambitions personnelles, il devient urgent d’ériger des garde-fous juridiques et populaires solides pour préserver l’esprit républicain. Ensuite, le renforcement des institutions électorales et judiciaires indépendantes s’impose comme une condition sine qua non de la restauration de la confiance publique. Ces institutions doivent être à l’abri des ingérences politiques, dotées de moyens suffisants, et encadrées par une culture d’intégrité et de redevabilité.

Par ailleurs, toute réforme ambitieuse de la gouvernance en Afrique passe nécessairement par un investissement massif dans la jeunesse. Il faut accompagner l’émergence de nouvelles élites, formées à l’éthique du service public, à la gestion transparente des affaires de l’État et à la résolution pacifique des conflits. La formation d’une nouvelle génération de leadership, ancrée dans les réalités contemporaines mais ouverte aux exigences d’un monde globalisé, est une urgence stratégique.

Enfin, les systèmes politiques africains doivent être recentrés sur la performance publique, en s’appuyant sur les principes du Nouveau Management Public. Cela implique une évaluation régulière des politiques publiques, une gestion axée sur les résultats, et une responsabilisation claire des dirigeants à tous les niveaux. La culture de l’impunité doit céder la place à celle de la performance mesurable et du service rendu à la collectivité. L’administration publique, tout comme les appareils politiques, doit cesser d’être une machine clientéliste pour redevenir un outil de transformation sociale.

C’est à ce prix que l’Afrique pourra bâtir des États forts, respectés et durables, portés par des institutions crédibles, capables de résister aux dérives autoritaires, et de répondre efficacement aux aspirations profondes de leurs citoyens. Le véritable tournant commence donc par la fin du pouvoir personnalisé et la construction d’un ordre politique fondé sur l’intérêt général, la responsabilité, et la relève générationnelle.

Conclusion

Le phénomène des chefs d’État au pouvoir depuis plus de trente ans n’est pas seulement une anomalie démocratique ; il est le symptôme d’un mal plus profond qui gangrène les systèmes politiques africains : la personnification du pouvoir, l’usure des institutions, la paralysie de la gouvernance, et l’étouffement des générations montantes. Il contribue à fragiliser les bases mêmes de la légitimité étatique, à miner la cohésion sociale, et à entretenir un cercle vicieux de pauvreté, de dépendance diplomatique et de désespoir citoyen. L’alternance démocratique, la redevabilité publique et la valorisation du leadership jeune et compétent ne doivent plus être des promesses abstraites, mais des exigences concrètes au cœur de tout projet de société digne de ce nom.

Refonder les systèmes politiques africains sur des bases impersonnelles, transparentes et performantes est un impératif historique. Il en va non seulement de l’avenir institutionnel du continent, mais aussi de la dignité de ses peuples sur la scène internationale. Tant que l’Afrique ne se dote pas de dirigeants renouvelés, portés par des institutions solides et redevables, elle continuera à subir les humiliations diplomatiques, les fuites massives de ses cerveaux, et l’incapacité à régler elle-même ses propres conflits.

Pour une analyse plus approfondie de ces enjeux, je vous invite à lire mon ouvrage « L’Afrique trahie : Démocratie et développement en danger », paru en janvier 2025 aux Éditions Generis. Cet essai offre une lecture transversale et critique des dérives institutionnelles, des impasses politiques et des alternatives de réforme réaliste pour que le continent cesse d’être la scène d’une trahison continue de ses idéaux démocratiques et de ses promesses de développement.

13/06/2025

Quel est cet officier qui peut oser poser ses pieds sur un terrain miné ? Au nom de quelle rationalité ?

27/08/2024

Le CSAC, ex HAM, a perdu l'un de ses techniciens en observation, monitoring et évaluation des contenus diffusés par les médias.

Gaudens Banza Tierfolo, que j'ai trouvé en juillet 2004 conseiller à la Haute Autorité des Médias, lorsque j'ai pris les fonctions de Vice Président chargé des études, de la promotion et du développement des médias.

À la création du Centre de Monitoring des médias, il sera coordonnateur adjoint, coordinateur, avant d'être investi membre du Conseil Supérieur de l'audiovisuel et de la Communication, Haut Conseiller, en août 2011.

Il y est resté jusqu'à sa mort le 18 août 2024, après 22 mois de son deuxième mandat, commencé le 15 octobre 2022, bénéficiant de l'ordonnance présidentielle d'investiture.

Un expert en régulation des médias a quitté le monde, en laissant derrière lui, des talents qu'il sera difficile de trouver de si tôt.

02/02/2024

Le quatrième cycle électoral en RDC a montré le déséquilibre permanent dans la distribution du temps d'antenne et des temps de parole aux acteurs sociopolitiques en compétition.

Une seule radio a défendu correctement le respect de la pluralité d'opinions : Top Congo FM, au point de surclasser le médias de services publics en jouant pratiquement son rôle. Le privé a donné des leçons à l'étatique, noyé dans un culte aux détenteurs du pouvoir, dans un déséquilibre criant. Des frustrations sont certes aggravées.

Le régulateur officiel a été confronté au problème insoluble de financement, à temps, des opérations de précampagne, de campagne et d'encadrement des médias pour la sensibilisation à l'acceptation des résultats des urnes, quels qu'ils soient. Privé des moyens financiers et techniques pour suivre et encadrer les médias, le CSAC n'a pas réussi à d'offrir les mêmes conditions de visibilités et d'expression à tous les protagonistes. Cette institution d'appui à la démocratie s'est limitée alors à la programmation des enregistrements et diffusions des émissions réservées aux candidats des présidentielles. Incapable d'aller au-delà en offrant des espaces de vulgarisation des idéologies politiques défendues par les uns et les autres, les articulations de leurs projets de société et plan d'actions,...

Il n'est pas étonnant que la campagne électorale s'est transformée en pugilat verbal, avec des attaques personnelles et des thématiques violant la ligne rouge xénophobe, raciste, ultra-nationaliste, ajoutée à des vœux pieux.

Les autres médias privés, communautaires et même confessionnels, ont raté l'occasion d'affirmer, pour le quatrième essai, leur équidistance vis-à-vis des forces politiques dominantes, l'indépendance et la neutralité de la presse étant mises en mal. Le quatrième pouvoir est loin de se reconnaître comme tel, en retrouvant ses lettres de noblesse, en République Démocratique du Congo.

02/05/2023

L'équilibre social tient au respect des normes par les concurrents. Nécessité d'un régulateur par secteur.

La patrie avant tout.De toutes les façons, Lévêque de Vatican a lancé un message profond aux dirigeants et autres tribal...
01/02/2023

La patrie avant tout.
De toutes les façons, Lévêque de Vatican a lancé un message profond aux dirigeants et autres tribalistes, défendant les membres de leurs ethnies, affameurs du peuple appauvri sur un sol riche ; aux exploitants lointains et proches des frontières qui sèment la mort et la désolation sur l'espace vital congolais ; aux injustes friands du pouvoir pour le pouvoir ; et à bien préparer des élections libres, transparentes et inclusives.
Oyo aza na matoyi ya koyoka ayoka. Le prix à payer pour la paix et la réconciliation.
Bon démarrage du deuxième mois de l'année électorale, année de vérité.

Address


Telephone

+243856402399

Website

Alerts

Be the first to know and let us send you an email when HAM/CSAC posts news and promotions. Your email address will not be used for any other purpose, and you can unsubscribe at any time.

Contact The Business

Send a message to HAM/CSAC:

Shortcuts

  • Address
  • Telephone
  • Alerts
  • Contact The Business
  • Claim ownership or report listing
  • Want your business to be the top-listed Media Company?

Share