12/09/2025
CHAPITRE 1
La vie de certains hommes ressemble à un chemin pavé de sourires forcés et de silences lourds. On les croise chaque jour, bien habillés, polis, parfois même souriants. Mais derrière leurs épaules droites se cache un poids que personne ne devine vraiment.
David faisait partie de ces hommes-là. Pour ses collègues, il n’était qu’un employé ordinaire. Pour son entourage, un fils discret, peut-être trop réservé. Mais dans le secret de ses nuits, il portait des cicatrices que ni le temps ni les efforts n’avaient réussi à effacer.
Chaque matin, il se levait comme un soldat qui connaît déjà la guerre avant même d’avoir quitté sa chambre. Et chaque soir, il rentrait plus fatigué qu’au matin, non pas à cause des dossiers ou des reproches, mais à cause de ce combat invisible qui lui pliait le cœur et alourdissait ses pas.
C’est dans ce contraste – entre l’homme que l’on voit et l’homme qui souffre en silence – que commence notre histoire.
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La maison
La petite maison se tenait au bout d’une rue calme, entourée de fleurs simples et de murs un peu usés par le temps. Dans la cuisine, les rideaux laissaient passer une lumière douce qui se mêlait à l’odeur du thé fumant. La pièce respirait la chaleur d’un foyer modeste : des chaises en bois, une nappe fleurie, des photos anciennes accrochées au mur.
Esther avait préparé deux tasses, comme chaque matin. Elle savait déjà qu’une resterait intacte. Son fils, déjà prêt à partir, ajustait sa chemise devant le miroir du couloir. Ses gestes étaient mécaniques, presque pressés.
— David, tu pars si vite. Tu n’as presque rien avalé hier soir, et ce matin c’est pareil.
— Maman, je n’ai pas le temps. Et même si je restais, je n’aurais pas faim. Là-bas, au travail, le patron m’attend comme un fauve. Il n’en a jamais assez.
Esther s’approcha de lui, posant une main ferme mais tendre sur son bras.
— Mon fils, je te connais. Ce n’est pas qu’une question de travail. Tes yeux me disent autre chose. Qu’est-ce qui te ronge ainsi ?
David détourna le regard, crispant ses mâchoires.
— Rien, maman. Laisse tomber.
Elle insista, ses yeux plongés dans les siens.
— Ne mens pas. Je t’ai vu pleurer, David. Tu crois que ça échappe à une mère ? Tu te consumes en silence.
Il soupira lourdement, comme s’il ouvrait une brèche dans sa forteresse intérieure.
— Tu veux la vérité ? Je me sens étouffé de partout. Marc me reproche encore mes erreurs passées, le travail me tue, et… (il s’arrêta, les mots coincés).
— Et ? demanda Esther, la voix tremblante.
— Et il y a Sarah… pas celle du bureau. Tu sais, celle que j’aimais. Elle m’a dit qu’elle ne pouvait pas construire sa vie avec un homme “instable”. J’entends encore sa voix. Est-ce que tu sais ce que ça fait, maman, d’aimer sincèrement et de se faire rejeter comme si tu ne valais rien ?
Esther prit ses mains entre les siennes.
— Oui, mon fils. Les paroles peuvent frapper plus fort que des coups. Mais elles ne disent pas qui tu es. Dieu voit au-delà de tes échecs, au-delà de tes blessures. Jésus a porté bien pire, et c’est par Lui que tu peux te relever.
David secoua la tête, partagé entre colère et tristesse.
— Alors pourquoi je n’arrive pas à avancer ? Pourquoi chaque pas est-il un combat ?
— Parce que tu essaies de porter seul ce que Dieu seul peut porter. Confie-Lui ton fardeau, David. Tu n’as pas à te battre seul.
Il baissa les yeux, incapable de soutenir son regard.
— Prie pour moi, maman… je n’ai plus la force.
La voix brisée d’Esther répondit qu’elle le ferait. Mais déjà, David attrapait sa mallette et franchissait la porte, laissant derrière lui le parfum de son désespoir.
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Le bureau
Le bureau se dressait dans un grand bâtiment impersonnel, aux murs gris et aux néons trop vifs. Dès l’entrée, le chaos s’imposait : téléphones qui sonnaient sans cesse, claviers qui claquaient frénétiquement, dossiers empilés comme des tours fragiles prêtes à s’effondrer. L’air lui-même semblait saturé de stress et d’exigences.
À peine David franchit-il la porte que son patron, en pleine conversation téléphonique, leva les yeux vers lui. Son visage s’assombrit aussitôt.
— David ! Voilà enfin ! Tu crois que c’est une maison de vacances ici ? (il raccrocha brusquement) Le dossier d’hier est incomplet ! Tu veux me faire perdre mes clients ?
David baissa la tête.
— Je… je vais corriger ça, monsieur. Excusez-moi.
— Excuses, excuses ! Tu n’as que ça à la bouche. Travaille mieux ou prépare ton départ !
La porte du bureau claqua violemment, laissant flotter un silence gêné. Les collègues baissèrent les yeux, sauf Sarah, qui leva la tête avec un sourire narquois.
— Toujours pareil… Tu te fais crier dessus, tu t’excuses, tu baisses la tête. Dis-moi, David, tu crois que ton Jésus va descendre du ciel pour corriger tes dossiers ?
Il inspira profondément, combattant la colère qui m***ait.
— Sarah, tu parles de ce que tu ne comprends pas. Ma foi n’est pas une fuite. C’est la seule chose qui me garde debout quand tout s’écroule autour de moi.
Elle haussa les épaules avec dédain.
— Debout ? Pardon, mais tu ressembles plutôt à un homme plié sous un poids qu’il n’assume pas. Moi, je préfère compter sur mes propres forces. Pas sur des illusions.
David ne répondit pas. Il retourna lentement à son bureau, ses mains tremblant légèrement sur le clavier. Sa silhouette, courbée sous un fardeau invisible, se dessinait dans la lumière crue des néons, comme un cri silencieux que personne ne voulait entendre.
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📖 Titre : Les Fardeaux Invisibles
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