L'enquêteur

L'enquêteur Quotidien Nigérien d'Informations

18/08/2025

La Justice mise au pas : Fin du premier acte ?
(Quotidien L’Enquêteur du Lundi 18 août 2025, article hors parution)
La stratégie de la rupture du SAMAN
Face à la dissolution jugée illégale de leur syndicat, les magistrats, via le communiqué du 13 août 2025, ont opté pour une double offensive :
Une offensive juridique et institutionnelle, en invoquant la violation des conventions internationales et des lois nationales pour asseoir leur légitimité.
Une offensive ad hominem, en attaquant frontalement et de manière très personnelle le Garde des Sceaux. En exhumant un passé controversé, le SAMAN a cherché à discréditer son adversaire direct et à déplacer le débat du terrain purement administratif vers celui de la morale et de l'éthique.
Cette stratégie de la confrontation maximale, bien qu'efficace pour mobiliser le corps judiciaire et attirer l'attention du public, était une tactique à haut risque. Elle a personnalisé le conflit, le présentant non plus seulement comme une défense de l'État de droit, mais aussi comme un règlement de comptes.
La réponse asymétrique du pouvoir Exécutif
La réaction du Président de la République a été immédiate, radicale et asymétrique. Au lieu de répondre sur le terrain du droit ou de la communication, le pouvoir Exécutif a utilisé son attribut régalien le plus direct : le pouvoir de nomination et de révocation.
En radiant successivement les deux principaux leaders du mouvement (le SG, puis le SG/A du SAMAN), le gouvernement a envoyé un message sans équivoque :
Le refus du dialogue sous la contrainte : Toute contestation frontale sera sanctionnée individuellement et sévèrement.
La démonstration de force : Le pouvoir Exécutif a démontré qu'il avait les moyens de décapiter le mouvement syndical aussi souvent que nécessaire, rendant la stratégie de la "justice morte" coûteuse pour les magistrats eux-mêmes.
La désescalade : pragmatisme et médiation
La reprise du travail par les magistrats le lundi 18 août 2025, après seulement un jour de grève effective, peut s'interpréter comme un acte de pragmatisme face à un rapport de force défavorable. La poursuite de la grève aurait probablement entraîné d'autres radiations, menaçant l'intégrité du corps judiciaire dans son ensemble.
L'intervention du "groupe de bonne volonté" a été cruciale. Elle a offert une porte de sortie honorable aux magistrats, leur permettant de reprendre le travail non pas en signe de soumission directe à l'Exécutif, mais en réponse à l'appel de médiateurs respectés (Bâtonnier, membres de la société civile, etc.). Cette médiation a permis de sauver la face des deux côtés : les magistrats ont évité de nouvelles sanctions et le gouvernement a obtenu la fin de la grève sans avoir à céder sur le fond (la réintégration des magistrats radiés).

Conclusion : Un compromis précaire
En apparence, l'Exécutif a remporté la bataille de l'autorité : Le SAMAN reste dissout et ses leaders radiés. Toutefois, cette victoire a un coût : une crise de confiance profonde avec une institution clé de l'État. Les magistrats, de leur côté, ont perdu la confrontation directe mais ont, par le sacrifice de leurs leaders, posé la question de l'indépendance de la justice et des libertés syndicales avec une acuité nouvelle et dramatique.
Cette crise laisse donc des cicatrices et une question en suspens : s'agissait-il d'une mise au pas définitive de la justice ? Une chose est sûre : la reprise du travail s'apparente à un compromis tacite et précaire.
La Rédaction

14/08/2025

Crise ouverte entre le pouvoir et la justice
Le secrétaire général du SAMAN radié de la magistrature
(Quotidien L’Enquêteur du Jeudi 14 août 2025, article hors parution)
La tension entre le pouvoir exécutif et une partie du corps judiciaire a atteint un point critique avec la radiation du magistrat Bana Abdourahamane Abdoul Nasser, secrétaire général du Syndicat Autonome des Magistrats du Niger (SAMAN). La décision, prise par décret du président de la République, le général d’armée Abdourahamane Tiani, est intervenue ce jeudi 14 août 2025, au lendemain d’un communiqué au vitriol du SAMAN signé par l’intéressé.
Cette escalade fait suite à la dissolution par le ministère de l’Intérieur, le 7 août, de plusieurs organisations syndicales du secteur de la justice, dont le SAMAN. En réponse, le syndicat avait publié le 13 août un communiqué qualifiant la décision d’« arbitraire » et de « violation flagrante » des conventions internationales du travail et des lois nigériennes. Le texte dénonçait une « attaque inacceptable contre le droit des magistrats à s’organiser » et une atteinte à la séparation des pouvoirs.
Dans ce communiqué particulièrement virulent, le SAMAN s’en prenait directement au Garde des Sceaux Alio Daouda, l’accusant d’incompétence et de nourrir une « haine viscérale » envers le syndicat. Le document affirmait que « la justice ne se réforme pas par la dissolution de ses défenseurs » et appelait l’ensemble des acteurs judiciaires et la société civile à se mobiliser pour la défense de l’État de droit face à une « dérive autoritaire du régime ».
La réplique du pouvoir exécutif a été immédiate et d’une sévérité extrême. En radiant le signataire du communiqué, l’Exécutif envoie un message sans équivoque à l’ensemble des corps constitués. Cette mesure radicale, qui court-circuite les procédures disciplinaires habituelles du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), ouvre une crise sans précédent et soulève des interrogations sur l’avenir de l’indépendance de la justice et des libertés syndicales au Niger.
La Rédaction

13/08/2025

Crise de la Justice : le piège de la riposte "coup de poing"
(Editorial de Soumana I. Maïga, Quotidien L’Enquêteur du Mercredi 13 août 2025, article hors parution)
Le communiqué du SAMAN est un uppercut. Il invoque normes nationales et internationales, dénonce une décision « arbitraire », annonce des recours. Sur le plan du droit, l’architecture est claire : motivation, proportionnalité, protection de la liberté syndicale. Sur la communication, le syndicat choisit la surenchère : charges personnelles, passé du ministre de la Justice exhumé, vocabulaire incendiaire. Efficace pour mobiliser, mais hasardeux s'il s'agit de convaincre, au delà du premier cercle.
Car une bataille d’opinion se gagne par la crédibilité. L’émotion donne l’élan, la précision fait la différence. En ciblant la personne du Garde des Sceaux, le SAMAN prend le risque de déplacer le débat du terrain institutionnel (indépendance de la justice) au terrain des ressentiments. Or sa force est juridique et civique : défendre un contre pouvoir, pas régler des comptes.
Quelle stratégie gagnante ? Premièrement, œuvrer pour la suspension de l’arrêté de dissolution le temps du contrôle juridictionnel. Deuxièmement, rouvrir un dialogue balisé par des échéances et des objectifs opérationnels (gestion des effectifs, moyens des juridictions, calendrier de réformes etc.) pour montrer que le syndicat ne protège pas un statut, mais un service public. Troisièmement, déléguer le registre polémique à des soutiens extérieurs ; le SAMAN doit rester la voix du droit.
La riposte coup de poing attire l’œil. La riposte méthodique emporte l’adhésion. Pour gagner la bataille des esprits, il faut transformer l’indignation en démonstration — et l’instant médiatique en réforme durable. Ne nous trompons pas citoyens, cette crise nous concerne tous parce qu’elle conditionne la justice que nous recevrons demain.

13/08/2025

Dissolution des syndicats
SAMAN vs Gouvernement, la riposte féroce des magistrats
(Quotidien L’Enquêteur, article hors parution du mercredi 13 août 2025)
Le communiqué de presse du Syndicat Autonome des Magistrats du Niger (SAMAN), daté du 13 août 2025, constitue une réponse virulente à la décision gouvernementale de dissoudre plusieurs organisations syndicales du secteur de la justice, dont la sienne. Le texte s'articule autour d'une argumentation juridique, d'une contre-attaque frontale envers le ministre de la Justice et d'un appel à la mobilisation générale.
Une dissolution jugée illégale et arbitraire
D'emblée, le SAMAN qualifie l'arrêté ministériel de dissolution de « décision arbitraire ». Pour étayer cette affirmation, le syndicat fonde son argumentaire sur une violation de plusieurs textes juridiques nationaux et internationaux. Il cite notamment les conventions 87 et 89 de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) relatives à la liberté syndicale et à la protection du droit syndical, ratifiées par le Niger. Au niveau national, le syndicat invoque les articles 15 et 38 de la Charte de la Refondation ainsi que les articles 183 et 184 du code du travail. Pour le SAMAN, cet acte ne constitue pas une simple mesure administrative, mais une « attaque inacceptable » qui porte atteinte à la séparation des pouvoirs, un pilier fondamental de l'État de droit, et nuit à la crédibilité des institutions nigériennes.
Réfutation et attaque personnelle contre le Garde des Sceaux
La deuxième partie du communiqué se concentre sur la réfutation des justifications avancées par le Garde des Sceaux lors de son point de presse. Le SAMAN accuse le ministre d'avoir présenté des « contrevérités » pour justifier une décision jugée indéfendable. Le syndicat déplace alors le débat sur le terrain de la compétence et de la probité du ministre lui-même, dénonçant son inaction en matière de réformes judiciaires en deux ans de mandat et le « climat de stress permanent » qu'il aurait instauré.
Le ton devient ensuite extrêmement personnel. Le communiqué révèle un conflit ancien, rappelant l'exclusion du ministre du SAMAN en 2003 pour des raisons déontologiques et personnelles. Le syndicat l'accuse de nourrir une « haine viscérale » et d'utiliser sa position actuelle pour assouvir un « funeste dessein » de vengeance. Cette attaque ad hominem vise à discréditer la parole du ministre, le présentant comme une personne « déficitaire » en éthique et en déontologie, et rappelant son « triste passage » à la tête d'autres juridictions.
Appel à la mobilisation et voies de recours
Face à cette situation, le SAMAN ne se contente pas de protester. Le syndicat affirme sa détermination à utiliser les voies légales en annonçant avoir déjà engagé des recours contre l'arrêté de dissolution. Il se félicite du soutien reçu d'autres organisations syndicales, de la société civile et du Barreau, y voyant un front commun contre une « dérive autoritaire ». Le communiqué se termine par un appel solennel à l'ensemble des acteurs judiciaires et à la société civile pour se mobiliser afin de défendre l'État de droit et de condamner toute tentative de soumission de la justice à des influences politiques, réaffirmant son attachement à une justice indépendante.
Commentaire
Ce communiqué est un document éminemment politique et polémique. S'il s'appuie sur des arguments juridiques solides concernant la liberté syndicale, il se distingue surtout par la violence de son attaque contre la personne du ministre de la Justice. Le mélange d'arguments de droit et d'attaques ad hominem, révélant des conflits passés, illustre une rupture de confiance totale et une crise profonde entre une partie du corps judiciaire et le pouvoir exécutif. Le ton employé, loin de la réserve habituellement associée à la magistrature, témoigne de l'intensité de la confrontation et de la gravité des enjeux perçus par le syndicat, qui vont au-delà de la simple dissolution pour toucher aux principes mêmes de l'indépendance de la justice et de l'État de droit.
La Rédaction

12/08/2025

Refonder n’est pas dompter
(Editorial de Soumana I. Maïga, publication du Mardi 12 Août 2025 hors parution du Quotidien L’Enquêteur)
En dissolvant, le 7 août 2025, les syndicats du secteur judiciaire puis en tentant d’en justifier la pertinence le 8 août, le pouvoir a franchi un cap décisif. Il ne s’agit pas d’un simple différend administratif : c’est une attaque frontale contre l’un des garde fous essentiels de l’État de droit. Un État qui fait taire ses contre pouvoirs organise sa propre impunité.
Le cœur du problème est double. Juridiquement, des arrêtés « sans motivation » ne peuvent pas valoir explication du fond ; politiquement, réduire au silence celles et ceux qui garantissent l’indépendance des juges, c’est fragiliser toute la chaîne de justice – du justiciable au magistrat. Quand, dans le même souffle, le Garde des Sceaux brandit la menace de poursuites contre des responsables syndicaux, il convertit un débat social en litige pénal, avec l’intimidation pour seul argument.
On nous dira que l’urgence impose des mesures « exceptionnelles ». Mais c’est précisément dans l’exception que se mesure la sincérité d’une Refondation. La Charte de la Refondation du CNSP, les Conventions 87 et 98 de l’OIT et la Charte africaine des Droits de l’Homme ne sont pas des slogans : elles obligent. Dissoudre d’abord et motiver ensuite, c’est inverser la charge de la preuve ; c’est demander à la liberté de démontrer qu’elle mérite d’exister.
Les effets pervers sont déjà visibles : refus d’assistance des avocats devant certaines instances, décisions de justice entravées, climat de peur dans les greffes et les parquets. À court terme, on muselle ; à moyen terme, on érode la confiance. Et lorsque la sanction touche même l’inamovibilité des magistrats : c’est un signal de défiance envers tout le corps judiciaire.
La sortie de crise existe. Elle tient en trois gestes : abroger les arrêtés de dissolution ; n’entreprendre aucune poursuite visant des responsables syndicaux ; ouvrir, sous l’égide d’observateurs indépendants, un dialogue public qui produise des engagements vérifiables. Refonder n’est pas dompter : c’est accepter le contrôle, y compris quand il dérange. Si le pouvoir veut convaincre, qu’il commence par protéger le droit de le contester.
Car l’enjeu dépasse les syndicats : c’est la crédibilité même des décisions publiques qui est en jeu. Une justice bâillonnée produit des victoires immédiates et des défaites durables. Rendre la voix aux contre pouvoirs, c’est restaurer la confiance – et donc l’autorité.

08/08/2025

Relaxe des lesbiennes : La troublante mutation d'un juge
(Quotidien L’Enquêteur, article hors parution du vendredi 8 août 2025)
Le 5 août 2025, un juge du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey a prononcé la relaxe de deux jeunes femmes poursuivies pour "outrage public à la pudeur" en raison de leur relation homosexuelle. Se fondant sur une analyse stricte du droit, il a conclu que l'infraction n'était pas constituée, les actes relevant de la sphère privée et non publique. Cette décision courageuse, prise malgré les réquisitions sévères du ministère public qui réclamait la peine maximale (3 ans de prison ferme) à des fins "d'exemple", semblait réaffirmer la primauté de la loi sur la morale et les pressions sociales.
Cependant, le dénouement de cette affaire a pris une tournure inattendue et troublante. À peine 48 heures après ce verdict, le 7 août 2025, le juge en question a été muté de son poste de juge au tribunal. Il est désormais affecté à la Chancellerie, au sein de l'administration centrale du Ministère de la Justice. Ce transfert, intervenant si rapidement après une décision de justice aussi médiatisée et controversée, ne peut manquer de susciter des questions.
Cette affectation est-elle une simple coïncidence administrative, une réorganisation de routine ? Ou doit-on y voir, comme le suggère la chronologie des faits, une sanction déguisée ? S'agit-il d'une réponse de la hiérarchie judiciaire ou politique, mécontente d'un verdict jugé trop clément ou contraire aux "us et coutumes" ? Si tel est le cas, quel message cette mutation envoie-t-elle aux autres magistrats du pays ? Un juge est-il encore libre de dire le droit en toute conscience, même lorsque sa décision va à l'encontre des attentes populaires ou du pouvoir exécutif ? Cette situation ne risque-t-elle pas de créer un climat d'autocensure au sein de la magistrature, où la crainte de la mutation ou de la sanction l'emporterait sur l'application impartiale de la loi ?
La Rédaction

06/08/2025

Axe Niamey-N'Djaména : La nouvelle colonne vertébrale du Sahel
(Quotidien L’Enquêteur du mercredi 6 Août 2025, article hors parution)
La visite de travail du Maréchal Mahamat Idriss Déby Itno, Président de la République du Tchad, à Niamey les 6 et 7 août 2025, sur invitation du Général Abdourahamane Tiani, Président de la République du Niger, s'inscrit dans une dynamique de renforcement des liens historiques et fraternels entre les deux nations sahéliennes. Le communiqué conjoint publié à l'issue de cette rencontre met en lumière une volonté partagée d'approfondir la coopération sur les plans économique, sécuritaire et diplomatique.

Une coopération économique ambitieuse et stratégique
L'axe principal de cette visite a été le renforcement de la coopération économique, avec des engagements concrets dans plusieurs secteurs vitaux pour le développement des deux pays.
• Hydrocarbures et Énergie : Le Niger s'est engagé à "redynamiser l'approvisionnement" du Tchad en gasoil, un accord crucial pour la sécurité énergétique tchadienne. Plus ambitieux encore est le projet de construction d'un pipeline commun Niger-Tchad, qui témoigne d'une vision à long terme pour l'intégration des infrastructures énergétiques régionales. De plus, la collaboration sur le méga-projet énergétique de Salkadamna (visant 5 200 MW) illustre une ambition partagée de répondre aux besoins énergétiques croissants de la région.
• Infrastructures et Numérique : Les deux États ont convenu d'accélérer la finalisation de projets d'interconnexion majeurs, notamment la fibre optique et la Route Transsaharienne (RTS). Ces infrastructures sont essentielles pour désenclaver la région, stimuler les échanges et renforcer l'intégration économique. L'accord sur le partage de points d'atterrissement de câbles sous-marins et l'interconnexion des datacenters positionne les deux pays dans une perspective de souveraineté numérique et de transformation digitale.
• Commerce et Investissements : La signature prochaine d'un Mémorandum d'Entente sur le commerce et l'investissement, couplée à la facilitation de l'usage des corridors et à la lutte contre la fraude, vise à accroître de manière significative le volume des échanges commerciaux, jugé en deçà de son potentiel.

Convergence politique et diplomatique
Au-delà des aspects économiques, la visite a réaffirmé une forte convergence de vues sur les questions politiques et diplomatiques, tant au niveau régional qu'international.
• Facilitation de la Circulation : Un point notable est la réaffirmation de l'accord sur l'exemption de visas et la volonté de faciliter les conditions de séjour et d'établissement pour leurs ressortissants respectifs. Cette mesure concrète renforce les liens humains et commerciaux.
• Renforcement de la Présence Diplomatique : La décision du Tchad d'ouvrir un Consulat Général à Diffa, une région frontalière stratégique, a été accueillie favorablement par le Niger. Ce geste symbolise une volonté de renforcer les services consulaires et de mieux encadrer les importantes communautés de part et d'autre de la frontière.
• Dialogue Régulier : Les deux chefs d'État ont insisté sur la nécessité de maintenir un dialogue politique régulier, notamment par la tenue prochaine de la grande commission mixte de coopération à N'Djaména, assurant un suivi institutionnel des engagements pris.

Un front commun face à l'insécurité
Bien que le communiqué reste général sur ce point, il mentionne explicitement que la "situation sécuritaire au Sahel notamment la lutte contre le terrorisme" a été un sujet majeur des discussions. La coopération en matière de défense et de sécurité est un pilier historique de la relation nigéro-tchadienne. Cet échange s'inscrit dans un contexte où les deux pays partagent une longue frontière et font face à des menaces terroristes communes, rendant leur collaboration indispensable pour la stabilité de la région du Lac Tchad et du Sahel en général.
Commentaire
Cette visite présidentielle et le communiqué qui en découle ne sont pas de simples formalités diplomatiques ; ils dessinent les contours d'un axe stratégique Niamey-N'Djaména renforcé. Dans un environnement sahélien marqué par l'instabilité politique et sécuritaire, ce rapprochement pragmatique est un signal fort de résilience et de coopération Sud-Sud.
Les projets annoncés, qu'il s'agisse du pipeline, de la fibre optique ou de la Route Transsaharienne, sont des projets structurants qui, s'ils sont menés à terme, pourraient transformer l'économie des deux pays et renforcer leur souveraineté. L'accent mis sur des résultats concrets et des délais rapides ("dans les meilleurs délais", "accélérer les échanges") témoigne d'une volonté politique de passer des paroles aux actes.
Enfin, cette rencontre symbolise une Afrique qui prend son destin en main, en privilégiant des solutions régionales à ses défis énergétiques, économiques et sécuritaires. Le succès de cette coopération bilatérale pourrait servir de modèle et d'inspiration pour une intégration plus poussée au sein de l'espace sahélien. La concrétisation des ambitieux projets annoncés sera le véritable test de la solidité de ce partenariat renouvelé.
La Rédaction

05/08/2025

Outrage public à la pudeur : Le couple de lesbiennes relaxé par le tribunal de Niamey
(Quotidien L’Enquêteur, article hors parution du mardi 5 août 2025)
Le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey a rendu son verdict ce mardi 5 août 2025 dans l’affaire très suivie d’un jeune couple de lesbiennes poursuivi pour « outrage public à la pudeur ». Contre toute attente, et malgré la sévérité des réquisitions du ministère public, les deux prévenues ont été relaxées, le juge estimant que les faits qui leur étaient reprochés n'étaient pas constitués.
Cette affaire, qui a mêlé l’intime à la sphère judiciaire, avait débuté suite à la découverte de vidéos et messages à caractère privé sur les téléphones des deux jeunes femmes, dévoilant leur relation amoureuse. L’enquête, déclenchée sur fond de rivalité amoureuse impliquant un tiers, avait conduit à leur arrestation et à leur placement en détention préventive le 16 juillet dernier à la Maison d’arrêt de Niamey.
Lors de l'audience du 29 juillet 2025, qui s'est tenue publiquement sur décision du juge à des fins « pédagogiques », les débats ont mis en lumière deux visions opposées. D’un côté, le ministère public, s’appuyant sur des arguments moraux et religieux, avait dénoncé des pratiques « qui jurent d’avec nos us et coutumes ». Il avait requis la peine maximale, soit trois ans d’emprisonnement ferme et 100.000 francs d’amende, pour l’exemple.
De l’autre, la défense avait plaidé l’erreur de jeunesse et le caractère privé des actes. L’avocat a insisté sur le fait que ses clientes n’avaient jamais eu l’intention de rendre publiques leurs vidéos, un élément central de l’infraction d’outrage public.
Finalement, le tribunal semble avoir suivi l’argumentaire de la défense. En relaxant les prévenues pour « faits non constitués », la justice a considéré que l'élément fondamental de l'infraction, à savoir le caractère public de l'outrage, n'était pas prouvé. Les actes, bien que reconnus, sont ainsi restés dans la sphère privée aux yeux de la loi, mettant un terme à des poursuites qui avaient suscité un vif émoi.
La Rédaction

01/08/2025

Après la Refondation politique, la Refondation morale
(Editorial de Soumana I. Maïga, Quotidien L’Enquêteur du Vendredi 1er Août 2025)
Depuis plus d'un an, le Niger vit au rythme d'un mot martelé sans cesse : "Refondation". Une refondation politique, institutionnelle, et même géopolitique, marquée par des ruptures et de nouvelles alliances. Ce projet, porté par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), a suscité l'espoir d'un renouveau, d'une rupture avec les tares du passé. Pourtant, au-delà des discours et des changements de partenaires, une question demeure, lancinante : à quand la Refondation morale ?
Car le plus grand échec du Niger, celui qui a traversé tous les régimes et anémié toutes les politiques de développement, reste la corruption. Ce n'est pas une série d'actes isolés, mais une véritable gangrène qui a métastasé dans tout le corps administratif, du plus petit échelon au plus haut sommet de l'État. Cette « maladie systémique » paralyse l'investissement, décourage les citoyens honnêtes, et détourne les maigres ressources publiques qui devraient financer nos écoles, nos hôpitaux, notre sécurité….
On peut changer de Constitution et de partenaires internationaux autant que l'on veut, mais tant que ce mal endémique ne sera pas traité avec une détermination absolue, tout projet de souveraineté est voué à l'échec. Aucun investisseur sérieux, aucun partenaire fiable ne misera sur un terrain miné par le clientélisme, les détournements et l’impunité. La corruption est le véritable ennemi intérieur, celui qui rend l'État inefficace et la justice impuissante.
L'heure n'est plus aux intentions. Le peuple attend des actes forts, des électrochocs symboliques qui prouveront que la volonté de changement est réelle. Il est urgent de lancer des audits indépendants et rigoureux de tous les secteurs-clés de l’Etat de ces dernières années. Il est crucial de donner un nouvel élan décisif et les moyens nécessaires à la Commission de Lutte contre la Délinquance Économique, Financière et Fiscale (COLDEFF) pour qu'elle puisse travailler en toute indépendance, sans craindre de s'attaquer aux puissants. Des sanctions exemplaires sans distinction de rang ou d’affiliation politique doivent frapper ceux qui se sont servis au lieu de servir.
Sans cette tolérance zéro envers la corruption, sans cette indispensable Refondation morale, la "Refondation" politique ne sera qu'un slogan de plus. Le Niger s'enlisera dans le même marécage qui a englouti les promesses des régimes précédents. La Refondation politique ne survivra que si elle s’appuie solidement sur une Refondation morale profonde et courageuse.

01/08/2025

Polygamie au nom d'Allah, mais sans la justice du Coran
Le grand détournement d'un principe religieux ?
(Quotidien L’Enquêteur du Vendredi 1er Août 2025)
Au Niger, la polygamie n'est pas seulement une pratique sociale, elle est une institution drapée dans une légitimité religieuse. Invoquer l'islam pour justifier la prise de plusieurs épouses est courant. Pourtant, une question fondamentale, à la fois simple et explosive, est systématiquement éludée : la pratique actuelle de la polygamie respecte-t-elle la condition non négociable imposée par le Coran lui-même ? Ou assiste-t-on à un détournement confortable d'un principe divin ?
Une pratique admise, mais strictement encadrée
Le verset 3 de la sourate An-Nisa (Les Femmes) est souvent cité comme la source de l'autorisation : « Il vous est permis d'épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent ». Cependant, la phrase est immédiatement suivie d'un avertissement d'une importance capitale : « mais, si vous craignez de ne pas être justes, alors une seule ». Le texte coranique insiste sur une justice absolue. Cette justice n'est pas seulement financière ; elle est émotionnelle, matérielle et intime. Elle exige une répartition scrupuleusement égale du temps, de l'affection, des ressources et de l'attention entre les épouses.
Or, dans la pratique nigérienne contemporaine, cette condition est souvent reléguée au rang de détail secondaire. On retient la permission, mais on oublie la restriction. La condition, si difficile à atteindre qu'elle s'apparente à une quasi-impossibilité, est transformée en une simple recommandation, laissant le champ libre à une interprétation qui arrange le pouvoir masculin.
Une réalité aux antipodes de l'idéal de justice
Loin de l'idéal de justice et de protection, la polygamie dans un contexte de précarité économique devient souvent une fabrique d'inégalités et de souffrances. Les foyers se transforment en arènes de rivalités où les co-épouses se battent pour les ressources limitées et l'attention d'un mari dépassé. Les enfants, nombreux et issus de lits différents, sont les premières victimes. Élevés dans un climat de dispersion affective et de manque de moyens, leur éducation et leur bien-être sont sacrifiés sur l'autel du statut social de leur père.
La figure de la première épouse, la « Fadjia », est emblématique de cette injustice. Après avoir bâti le foyer, elle est souvent délaissée, émotionnellement et financièrement, au profit d'une nouvelle venue plus jeune. Ce décalage entre la prescription divine et la pratique sociale est rarement questionné, tant la polygamie est banalisée. Pire encore, elle est souvent défendue au nom de l’islam, alors même qu’elle en trahit l’esprit. Ce que le Coran autorise de manière exceptionnelle, sous condition de justice absolue, est devenu une règle sociale automatique, déconnectée de sa base éthique et spirituelle.

Entre tradition et virilité : le silence qui arrange
Si ce décalage est si peu questionné, c'est que la polygamie a largement dépassé son cadre religieux pour devenir un puissant marqueur de virilité et de réussite sociale. Avoir plusieurs femmes est un signe de statut, une continuation de la tradition. Critiquer ce modèle est perçu non pas comme une interpellation théologique, mais comme une attaque contre les fondements de la société et les coutumes des ancêtres.
Ce silence est entretenu par une forme de consensus social où l'on préfère ne pas confronter les hommes à leurs responsabilités spirituelles. Le débat est ainsi verrouillé : la polygamie est « notre culture » et « notre religion », un point c'est tout.
En définitive, la question n'est pas de savoir si l'islam autorise la polygamie, mais si les hommes qui la pratiquent au nom d'Allah sont prêts à en assumer l'écrasante responsabilité. En ignorant l'exigence de justice, la pratique ne devient-elle pas une coquille vide, un acte social dénué de sa substance spirituelle ?
La Rédaction

31/07/2025

L'Algérie sur le pied de guerre
L’AES indocile dans le viseur de la paranoïa algérienne ?
(Quotidien L’Enquêteur du Jeudi 31 Juillet 2025)
En plein cœur d'une période marquée par les tensions régionales, le régime algérien a choisi une voie pour le moins inquiétante : celle du bellicisme législatif. L'entrée en vigueur, le 27 juillet 2025, d'une nouvelle loi sur la mobilisation générale n'est pas un simple ajustement technique ; c'est le symptôme d'une fébrilité politique qui cherche dans la posture martiale un remède à ses propres échecs. En officialisant le passage d'un état de paix à un état de guerre, le président Abdelmadjid Tebboune ne prépare pas le pays à une agression étrangère improbable, il met en scène une paranoïa d'État pour des raisons purement politiciennes. La question n'est pas de savoir si l'Algérie est menacée, mais plutôt de comprendre qui le régime a besoin de désigner comme menace.
Un arsenal juridique contre un ennemi fantôme
Sous des dehors technocratiques, le texte de loi est un chèque en blanc offert au pouvoir pour mettre l'ensemble du pays sous coupe militaire. Il prévoit la "concentration de tout ou d'une partie des capacités, des ressources humaines et des moyens matériels, économiques et financiers de l'État" et l' "adaptation de la production industrielle aux besoins des forces armées". Une telle mesure, radicale, ne se justifie que par un "péril imminent". Or, où est ce péril ? Le régime se garde bien de le nommer, préférant entretenir un flou qui lui permet de viser tout le monde et personne à la fois. Cette gouvernance par la peur est un outil éculé des régimes autoritaires : face à une population lasse des difficultés économiques et sociales, on agite le spectre d'un ennemi extérieur pour exiger l'unité nationale et faire taire toute contestation.
L'Alliance des États du Sahel (AES) en ligne de mire ?
Si l'ennemi n'est pas nommé, les regards se tournent inévitablement vers le sud. Les relations entre Alger et l'Alliance des États du Sahel (AES), composée du Niger, du Mali et du Burkina Faso, sont au plus bas. L'offre de médiation algérienne dans cette crise a été sèchement rejetée, constituant un camouflet diplomatique majeur pour un régime qui se rêve en puissance régionale incontournable. Dès lors, cette loi sur la mobilisation sonne comme une réponse du berger à la bergère, une tentative d'intimidation grossière envers des voisins qui ont osé défier son autorité.
Le régime algérien est-il prêt à envisager une confrontation militaire pour une simple brouille diplomatique ? Ce serait une folie stratégique, mais la logique du régime Tebboune n'est pas celle de la raison, mais celle de l'orgueil blessé. En bandant les muscles face à l'AES, Alger ne montre pas sa force, mais révèle sa frustration et son isolement croissant. Il s'agit moins de préparer une guerre que de lancer un avertissement : ne contestez pas notre pré carré. C'est une diplomatie de la menace, vouée à l'échec, qui ne fera qu'envenimer les relations et renforcer la méfiance au sein du Sahel.
Une fuite en avant pour masquer les faiblesses internes
En définitive, cette rhétorique guerrière est un écran de fumée. Elle vise à galvaniser une opinion publique morose et à détourner l'attention des véritables périls qui menacent l'Algérie : une économie de rente à bout de souffle, un chômage endémique et une absence de perspectives pour la jeunesse. En convoquant un "esprit patriotique" contre un ennemi largement imaginaire, le pouvoir algérien cherche à resserrer les rangs et à justifier un tour de vis sécuritaire. C'est une manœuvre dangereuse, qui prend en otage la stabilité régionale pour assurer la survie d'un régime.
Commentaire
En se dotant d'une loi de mobilisation générale, le régime algérien ne fait pas la démonstration de sa puissance, mais l'aveu de sa profonde faiblesse. Incapable de répondre aux aspirations de son peuple et de s'adapter aux nouvelles dynamiques géopolitiques du Sahel, il se réfugie dans une posture agressive et paranoïaque. Cette fuite en avant belliciste est non seulement une menace pour ses voisins, mais aussi pour les Algériens eux-mêmes, condamnés à subir les conséquences d'une politique irrationnelle qui sacrifie la paix et la prospérité sur l'autel de la survie d'une élite dirigeante déconnectée.
La Rédaction

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