
28/02/2025
Comment les paléontologues envisagent le comportement des dinosaures
Comment les scientifiques étudient-ils le comportement des dinosaures, disparus il y a 65 millions d’années ? Après tout, les fossiles de dinosaures sont déjà assez rares, et la plupart ne sont que des fragments difficiles à exploiter. C’est une question sur laquelle les paléontologues travaillent depuis les débuts de la recherche sur ces incroyables animaux. Jusqu’à récemment, cette étude se limitait souvent à des considérations vagues, comme déterminer quels animaux étaient herbivores ou carnivores. Mais de nouvelles opportunités s’offrent désormais à nous. Les paléontologues ont récemment réussi à reconstituer les couleurs et les motifs de certains dinosaures à plumes, en utilisant des microscopes électroniques pour observer de minuscules structures préservées qui contenaient autrefois les pigments de ces animaux lorsqu’ils étaient vivants. C’est une avancée que les scientifiques pensaient autrefois impossible. Cependant, cela ne nous en apprend qu’un peu pour l’instant : nous connaissons uniquement la couleur d’un individu au moment de sa mort.
L’étude de plusieurs spécimens d’une même espèce pourrait révéler si les mâles et les femelles avaient les mêmes couleurs ou si elles différaient, et si ces plumes subissaient des changements saisonniers ou variaient en fonction de l’environnement. Peut-être devenaient-elles blanches en hiver pour servir de camouflage. Peut-être que les plumes arboraient des couleurs différentes selon les régions. Cela suggérerait que l’environnement local aidait ces dinosaures à se dissimuler et qu’ils ne pouvaient pas être très mobiles, car leur camouflage n’aurait alors pas fonctionné. Peut-être que les mâles étaient vivement colorés pour attirer des partenaires, ou peut-être que les deux sexes l’étaient, ce qui indiquerait qu’ils participaient ensemble à l’élevage des petits. C’est une question que les scientifiques devraient pouvoir approfondir dans les années à venir. Pour certaines espèces au moins, comme le petit dinosaure à plumes Anchiornis, nous disposons des fossiles et des techniques nécessaires. Il nous suffit d’extraire les données des fossiles de dinosaures que nous avons. Nous avons déjà une bonne idée de la signification des couleurs et motifs chez différents groupes d’animaux vivants, et nous pouvons donc appliquer certaines de ces connaissances aux dinosaures.
Cependant, une grande partie du travail des chercheurs sur le comportement des dinosaures a été freinée par une mauvaise utilisation du comportement des animaux modernes comme modèle pour les dinosaures, ainsi que par une tendance à considérer des spécimens particuliers comme représentatifs de schémas plus larges. Par exemple, nous possédons des fossiles bien étudiés de dinosaures carnivores contenant des os d’autres animaux en leur sein. Il est indiscutable que ces dinosaures carnivores ont consommé ces autres animaux, mais il est difficile, voire impossible, de déterminer si la proie a été charognée ou chassée. Il est trop facile de supposer que le dinosaure se nourrissait principalement des espèces dont nous avons retrouvé les os dans son estomac. Or, les os ont plus de chances de survivre au processus de fossilisation, mais l’animal pouvait très bien avoir principalement mangé des muscles et des organes, ou même des insectes, qui ne laisseraient aucune trace fossile. Bien que de telles découvertes soient importantes, nous devons les considérer comme la preuve d’un événement ponctuel, et non comme une habitude alimentaire systématique. Ensuite, nous pouvons rechercher d’autres indices pour tester ou invalider cette hypothèse.
Dans ce contexte, nous avons vraiment de la chance. De nouveaux fossiles et de nouvelles techniques (comme les scanners CT, qui permettent d’examiner l’intérieur des crânes pour analyser le cerveau des dinosaures) sont encore régulièrement découverts. De plus, il y a sans doute aujourd’hui plus de chercheurs spécialisés dans les dinosaures que jamais auparavant, même si leur nombre reste relativement faible comparé à d’autres disciplines scientifiques. Cela signifie que nous obtenons sans cesse de nouvelles perspectives et de nouvelles sources d’information sur des aspects tels que l’alimentation des dinosaures, leur physiologie, les environnements dans lesquels ils vivaient, leur mode de déplacement et les transformations qu’ils subissaient en grandissant. C’est la matière première des études sur le comportement, et l’ajout de ces données à notre compréhension du comportement des animaux modernes offre un énorme potentiel pour les futures recherches sur les dinosaures (et d’autres animaux préhistoriques).
Un autre aspect à prendre en compte est la manière dont les paléontologues formulent leurs hypothèses sur le comportement des dinosaures. Par exemple, bien que nous ayons retrouvé plusieurs individus d’une même espèce de dinosaure ensemble à plusieurs reprises, cela ne signifie pas que cette espèce vivait habituellement en groupe, encore moins que leurs proches parents en faisaient autant. Les félins, en général, sont des animaux solitaires, mais si l’on inférait le comportement social des lions ou des guépards à partir de celui des tigres et des pumas, on penserait que ces animaux vivent seuls. Pourtant, les lions et les guépards mâles vivent généralement en groupes. Cependant, ils sont parfois solitaires et peuvent alterner entre une vie en solitaire et une vie sociale à différentes périodes de leur existence. Donc, supposer que le fait qu’un groupe de dinosaures ait été découvert ensemble signifie qu’ils vivaient tous en groupe, ainsi que leurs proches cousins, ne nous aide pas à comprendre leur véritable mode de vie. L’avenir de l’étude du comportement des dinosaures s’annonce prometteur.