04/11/2025
MAHAMAT MAHDI ALI LEADER DU FRONT POUR L'ALTERNANCE ET LA CONCORDE AU TCHAD (FACT)
« Notre liberté s'arrache »
Dans un entretien accordé à la chaîne WEB «Réveil Tchadien », le leader du FACT a rappelé que «Doha a été une occasion en or pour réconcilier tous les Tchadiens, et je remercie Doha pour cet acte ».
DakarTimes revient sur cette interview exclusive.
En avril 2021, nous avons respecté un cessez-le-feu.
Nous avons libéré leurs prisonniers, car, selon nos valeurs, nous respectons nos engagements. Mais la junte, elle, a refusé de libérer les nôtres. Pire encore, elle a relâché nos prisonniers sans dire où ils étaient ni dans quel état.
Où avons-nous failli ?
Mahdi, le peuple tchadien n'a jamais failli à son devoir. Rappelons que c'est le peuple tchadien qui a dit « oui » au général De Gaulle devant les Allemands, alors qu'il était plus facile de dire oui au maréchal Pétain.
Dire « oui » à De Gaulle, c'était déjà un acte de courage. Si les Tchadiens souffrent aujourd'hui, ce n'est pas par manque de courage, mais parce qu'ils n'ont pas encore trouvé le dirigeant qu'il leur faut. Il ne faut pas non plus oublier les problèmes que les pays voisins nous ont créés.
Chaque Tchadien et chaque Tchadienne doit œuvrer pour l'unité et la concorde afin de vaincre cette junte qui divise tout le monde.
Alliance
Nous vivons dans un monde où deux frères libyens se battent, alors qu'ils sont tous deux amis du Tchad. En 2021, nous avons tendu la main à tout le monde, mais personne ne nous a suivis. Notre main restera toujours tendue, aussi bien vers les politico-militaires que vers le peuple tchadien, qui décidera lui-même de son destin et de ses dirigeants.
Nous avons des camarades originaires du Sud, comme Modeste.
Notre mouvement est ouvert à tout le monde: je ne parle ni de Sud, ni de Nord, ni d'Est, ni d'Ouest le mouvement est pour tous les Tchadiens.
Que fait le FACT ? Pourquoi ce silence ?
Mahdi, nous ne serons pas le problème. Nous attendons pour voir la suite, car nous avons donné notre parole à Doha. Si le dialogue de Doha ou le dialogue national inclusif avait porté ses fruits, nous aurions déposé les armes sans condition.
Mais ce dialogue n'a été qu'un film, une mascarade. L'histoire, aujourd'hui, nous donne raison.
Sur la mort de Yaya Dillo, Saley Déby et d'autres...
Le monde entier sera surpris quand nous ferons le bilan: ce régime a failli sur tous les plans. Tout ce qui intéresse la junte, c'est de conserver le pouvoir. Succès est emprisonné, Idriss Y. Boy, son confident le plus connu, croupit aussi en prison. Pire encore, Saley, l'oncle de Déby, est mort dans des circonstances sus-pectes. Aujourd'hui, il n'y a pas une seule ethnie ni une seule région qui n'ait été touchée par les crimes de cette junte. C'est pourquoi j'ai insisté sur l'importance de se rapprocher de son voisin, pour recréer une véritable solidarité. La Constitution a été modifiée, et on dirait que tout se rapproche du modèle de Paul Biya. Sur le plan économique, l'agriculture, l'élevage, le coton notre fierté sont totalement détruits. L'élevage est à zéro. Des milliards sont exportés du Tchad, mais où sont les réalisations?
Aucune. Le Tchad est devenu une proie dans la bouche d'une mafia.
Pire encore, il n'existe aucune trace comptable claire sur l'or et l'anti-moine.
Enquête sur la mort d'Idriss Déby : qui l'a tué ?
Mahdi, quand on fait la guerre, on tue ou on est tué. Il n'est donc pas si important de savoir qui a tué qui.
Nous avons, nous aussi, perdu des camarades. Mais aujourd'hui, on s'inquiète de la mort de Déby sans même parler de Yaya Dillo. Nous ne savons pas qui a tué qui, et ce n'est pas cela qui compte pour nous. Je dois ajouter une chose: le premier à avoir dit que Déby avait été assassiné, c'est l'ex-ministre Jean-Yves Le Drian, pour fragiliser notre lutte.
Macron a redonné de l'espoir à ce régime, jouant le même rôle que son ancien ministre Jean-Yves Le Drian, qui avait déclaré que Déby avait été assassiné pour lui arracher sa vic-toire. La venue de Macron au Tchad a galvanisé la junte, car tous ceux qui nous ont combattus le 26 avril sont venus de N'Djamena, et nous espérons que cela ne se répétera pas.
Nous ne savions même pas si Déby était sur le terrain. C'est seulement le 19 au soir que nous l'avons appris.
Mahdi, aujourd'hui, le monde est connecté. Il faut en profiter pour mobiliser, expliquer que nous sommes condamnés à vivre ensemble, car ce pays nous appartient à tous. Déployez toute votre énergie pour écrire l'histoire.
Quelle est la force du FACT et quand N'Djamena ?
C'est simple: nous sommes prêts, et nous avons le matériel. Mais ce matériel seul ne suffit pas : c'est la volonté des jeunes qui fera la différence. Moi-même, chaque matin, en les voyant, je puise du courage et de la détermination dans leurs yeux. Il faut être patient. Nous pourrons entrer au Tchad demain ou dans dix ans. Notre objectif est de construire un État moderne pour ce peuple qui souffre chaque jour: un Etat avec une vraie santé publique, une éducation digne et des infrastructures solides. Nous avons rencontré des cadres, non seulement pour bénéficier de leur savoir, mais aussi pour qu'ils le mettent au service de la jeunesse.
Passerez-vous la fin d'année à N'Djamena?
Cela fait dix ans que je n'ai pas fêté chez moi. Nous faisons tout notre possible pour alléger la souffrance du peuple tchadien. Nous rentrerons d'ici, comme aujourd'hui ou dans dix ans ; mais d'ici la fin de l'année, on verra bien.
Conclusion
Merci à vous, et merci au peuple tchadien. Avec toute sincérité, notre priorité doit être le vivre-ensemble, afin de laisser un avenir meilleur à nos enfants. Moi qui vous parle, je suis profondément préoccupé par ce qui viendra après cette junte. Il faut de la fraternité pour éviter de revivre les drames que connait actuellement El-Fasher. Quant à la promesse de la fin d'année, on verra bien.
Source: RÉVEIL TCHADIEN