14/08/2025
65 Ans d’Indépendance : Analyse Comparative des Présidents du Tchad
Analyse de Joe Le Mutant – La Rédaction Charilogone
Le Tchad célèbre en 2025 ses 65 ans d’indépendance, acquise le 11 août 1960. Ce pays sahélien, riche en diversité culturelle et en ressources naturelles, a pourtant traversé une histoire politique marquée par l’instabilité, les guerres fratricides et une gouvernance souvent contestée.
Sept présidents se sont succédé, chacun laissant une empreinte singulière sur le destin national. Cette analyse comparative met en lumière leurs points forts et leurs faiblesses, en particulier les quatre derniers chefs d’État issus de la région du Borkou-Ennedi-Tibesti (BET), accusés d’avoir plongé le pays dans le chaos économique et politique.
François Ngarta Tombalbaye, premier président du Tchad, est considéré comme le père de l’indépendance. Il a su poser les bases de l’administration, de l’économie et de l’armée avec les seules ressources humaines disponibles, en s’appuyant sur les secteurs primaires comme l’agriculture et l’élevage. Il a également résisté à la pression libyenne en refusant de céder la bande d’Aouzou. Toutefois, son régime autoritaire, marqué par l’instauration du parti unique et une fiscalité écrasante, a provoqué la rébellion du Nord, donnant naissance au FROLINAT.
Félix Malloum, ancien chef d’état-major, renverse Tombalbaye en 1975. Il expulse l’armée française et tente une réconciliation avec les factions rebelles, notamment à Khartoum et Lagos. Malgré ses efforts, il échoue à contenir la rébellion et finit par s’exiler au Nigeria, où il meurt dans l’anonymat vingt ans plus t**d.
Lol Mahamat Choua, homme politique originaire du Kanem, prend brièvement les rênes du pays en 1979. Il maintient l’administration en place malgré la guerre civile, mais son manque de soutien militaire et l’éclatement du pays en onze tendances politico-militaires le contraignent à démissionner en 1980.
Goukouni Weddeye, soutenu par la Libye de Khadafi, instaure la cour martiale entre 1980 et 1982, réduisant les violences et rétablissant une sécurité relative. Cependant, son absence de formation supérieure et sa dépendance politique à Khadafi provoquent une scission au sein du FROLINAT. Hussein Habré, son rival, le renverse et Goukouni s’exile en Algérie jusqu’à son retour à la conférence nationale de 1993. Sous son règne, la bande d’Aouzou est occupée par les Libyens.
Hissène Habré, chef du FROLINAT et diplômé en sciences politiques, prend le pouvoir en 1982. Il restaure l’autorité de l’État, réorganise l’administration et récupère juridiquement la bande d’Aouzou. Il réhabilite Tombalbaye et relance l’économie. Mais son règne est marqué par une dictature sanglante : parti unique, répression des grèves, et plus de 40 000 morts. Il s’exile au Sénégal avec les richesses de l’État, dont un avion C130 rempli d’or. Jugé à Dakar, il meurt du COVID en 2020.
Idriss Déby Itno, sous-officier de l’armée et bras armé du FROLINAT, renverse Habré en 1990. Il instaure le multipartisme et organise une conférence nationale souveraine. Soutenu par la France, il extrait le pétrole de Doba avec Esso, consolidant son pouvoir pendant trois décennies. Mais il échoue à développer le pays, préférant investir dans l’armement et mener des guerres par procuration au Mali, Nigeria, Centrafrique, Soudan et RDC. Il militarise l’État, favorise sa région natale d’Amdjarass, et intègre des éléments soudanais dans l’armée tchadienne. Il meurt au combat contre le FACT en 2021, laissant un pays économiquement exsangue.
Mahamat Idriss Déby Itno, fils du Maréchal, prend le relais après la mort de son père. Militaire discret, il dirigeait la DGSSIE et combattait le FACT lorsqu’il apprend le décès de son père. Soutenu par l’armée clanique, il devient président de la transition puis de la 5e République. Favori d’Emmanuel Macron, il est installé au pouvoir par la France et élevé au rang de Maréchal. Mais son manque d’expérience politique, sa répression des contestations, et sa gestion clanique plombent l’économie. Il nomme sa tribu à des postes clés et se concentre sur le bien-être de ses proches, négligeant les enjeux nationaux.
Ainsi va le Tchad des Déby, où l’espoir d’un renouveau démocratique et économique semble encore lointain. Les Tchadiens, malgré leur résilience, font face à des jours sombres, dans l’attente d’un leadership véritablement tourné vers le peuple.
Analyse de Joe Le Mutant – La Rédaction Charilogone