22/08/2025
HaYba ÉDUCATION
L' Agonie de l'École Publique aux Comores.
Dans quelques semaines, les élèves reprendront le chemin des salles de classe. Aux Comores, chaque rentrée scolaire s’accompagne de nouvelles mesures et règles disciplinaires édictées à travers des notes et arrêtés ministériels, parfois signés par le secrétaire général du ministère de l’Éducation, parfois par le ministre lui-même.
Certaines de ces notes administratives se contentent de rappeler les lois d’orientation, le calendrier scolaire ou encore les conditions de transfert. Mais d’autres instaurent des mesures drastiques.
L’année dernière, une décision spectaculaire avait marqué les esprits : la fermeture de certaines écoles privées jugées, selon le ministre, « non conformes ». Cette mesure avait été signée par Bacar Mvoulana, fraîchement nommé ministre de l’Éducation. Cette année encore, à l’approche de la rentrée 2026, le ministère s’attaque cette fois-ci aux écoles publiques à faible effectif. Une décision qui a suscité de vives réactions et enflammé les réseaux sociaux, provoquant la colère des internautes.
Or, la question de l’école publique ne saurait passer inaperçue. Elle devrait au contraire mobiliser l’attention de tous, tant la situation est préoccupante. Depuis plusieurs années, l’école publique est confrontée à de multiples défis : grèves illimitées, infrastructures vétustes, manque d’enseignants dans le primaire, absentéisme chronique, budget insuffisant, négligence des autorités…..etc. Face à cette accumulation de problèmes, de nombreux parents se tournent vers l'école privé. Résultat : l’école publique se vide, s’affaiblit et finit, dans certains cas, par fermer définitivement.
La grande région de Hambou en est un exemple criant. Elle ne dispose d’aucun lycée public. Pire encore, Le collège public, celui de Mbibodjou, a fermé ses portes avant d’être transformé en hangars par une société chinoise, sous les yeux des autorités. Le collège n’abritait plus que 15 élèves répartis en quatre divisions. Ces derniers ont été contraints de rejoindre les établissements privés les plus proches. Cette situation illustre parfaitement la faillite du système public.
À Mitsamiouli, la situation n’est guère meilleure. Le collège public, délabré et presque à l’abandon, accueille très peu d’élèves. Une partie de ses locaux a même été réquisitionnée par la direction régionale des impôts. Quant au lycée de référence de la ville, il affiche depuis plusieurs années des résultats médiocres au baccalauréat. L’Office national des examens et concours l’a d’ailleurs abandonné comme sous-centre, faute d’infrastructures adaptées et de clôture.
À Anjouan, la situation est encore plus préoccupante. Les établissements publics souffrent d’un manque criant d’infrastructures et les salles de classe sont surchargées. À l’école publique de PANJE, au sud de Mutsamudu, les élèves manquent de salles pour être correctement accueillis. Ce même problème se retrouve dans plusieurs écoles de la région de Nyoumakélé. Sur l’île de Mohéli, l’état des écoles publiques n’est guère meilleur : les salles de classe y sont dans un état précaire, ni confortables ni hygiéniques.
Face à cet état des lieux alarmant, le ministère de l’Éducation semble détourner le regard. Plutôt que de s’attaquer aux véritables problèmes structurels de l’école publique, il préfère pointer du doigt les établissements privés. Pourtant, si aujourd’hui la localité de Hetsa ya Hambou ne dispose d’aucune école primaire publique, la faute n’incombe pas aux établissements privés, mais bien aux négligences répétées de l’État.
Il est urgent que les autorités assument leurs responsabilités. Les circonscriptions d’inspection pédagogique ne doivent plus être de simples spectateurs de la chute de l’école publique. L’État doit leur fournir les moyens administratifs et humains nécessaires à l’accomplissement de leur mission. Le ministre doit également veiller sur les encadreurs pédagogiques, qui à leur tour doivent s’assurer de la présence et de l’efficacité des enseignants.
ASM
Photos : HaYba Jumla
HaYba Jumla Digital African Voice From Moroni