18/04/2025
LA JOIE DE PÂQUES
Éditorial n°3987
Alors que nous sortons du temps du Carême, période marquée par une certaine réserve, une forme de retenue et de gravité en lien avec le don que le Christ fait de sa vie sur la croix, le temps de Pâques fait éclater la joie. Cette joie nous vient de la résurrection de Jésus, de cette certitude que rien, pas même la mort, ne peut résister à la puissance de l’amour de Dieu manifesté en Jésus : « J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 8,38-39).
Quand nous scrutons les Écritures, plus particuliè- rement l’Évangile de Jean, nous percevons combien cette joie trouve sa source dans la communion d’amour qui unit le Père et le Fils dans l’Esprit. Pour recevoir la joie véritable, le disciple est invité à lui-même entrer dans une relation de communion, à entretenir une connexion vivante avec Jésus.
Dans le long discours qui suit le lavement des pieds (Jn 13), Jésus souhaite laisser à ceux qu’il a appelés pour en faire des disciples, comme un testament, un héritage qui leur permettra de relire le chemin parcouru et d’accueillir la joie qui leur est donnée. Et cette joie paradoxalement passe par la tristesse et l’épreuve : « Amen, amen, je vous le dis : vous allez pleurer et vous lamenter, tandis que le monde se réjouira ; vous serez dans la peine, mais votre peine se changera en joie » (Jn 16,20). Mais cette tristesse en lien avec la mort à venir de Jésus ouvre à une espérance : la vie a le dernier mot. Le projet de Dieu s’entrevoit : tout homme peut vivre d’une joie pleine, parfaite et durable : « Vous aussi, maintenant, vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera » (Jn 16,22).
Cela suppose de comprendre que la joie que Jésus souhaite pour ses disciples, et donc pour chacun de nous, est profondément liée à la foi. Celui qui croit que Dieu peut tout réaliser, celui qui accueille Jésus, découvre alors cette joie qui jaillit de la foi. La joie de Pâques est joie de la foi. Ce qui fonde notre joie de chrétiens, c’est notre foi en la résur- rection du Christ à Pâques. Nous faisons partie de ces bienheureux qui croient sans avoir vu (Jn 20,29).
Dans une très belle méditation sur la joie de la foi proposée aux jeunes lors de la 27e journée mon- diale de la jeunesse, le pape Benoît XVI écrivait : « En réalité, les joies authentiques, que ce soient les petites joies du quotidien comme les grandes joies de la vie, toutes trouvent leur source en Dieu, même si cela ne nous apparaît pas immédiatement. La raison en est que Dieu est communion d’amour éternel, qu’il est joie infinie qui n’est pas renfermée sur elle-même mais qui se propage en ceux qu’il aime et qui l’aiment. Dieu nous a créés par amour à son image afin de nous aimer et de nous combler de sa présence et de sa grâce. Dieu veut nous faire participer à sa propre joie, divine et éternelle, en nous faisant découvrir que la valeur et le sens pro- fond de notre vie réside dans le fait d’être accepté, accueilli et aimé de lui, non par un accueil fragile comme peut l’être l’accueil humain, mais par un accueil inconditionnel comme est l’accueil divin : je suis voulu, j’ai ma place dans le monde et dans l’histoire, je suis aimé personnellement par Dieu » (Pape Benoît XVI - Extraits du Message du 15 mars 2012 pour la 27e journée mondiale de la jeunesse).
Et cette joie qui jaillit de Pâques, qui jaillit de Dieu nous rappelle qu’il n’y a de joie authentique qu’avec d’autres, qu’en communion. Lors de la Passion appa- raît une forme d’isolement des différents protago- nistes : Pierre renie Jésus seul lorsque ce dernier est interrogé par Caïphe (Jn 18,25-27), l’apôtre que Jésus aimait est seul avec Marie au pied de la Croix (Jn 19,26). En revanche, c’est ensemble qu’ils sont remplis de joie en voyant le Seigneur ressuscité (Jn 20,20), c’est ensemble qu’ils sont remplis d’Esprit Saint (Jn 20,22).
Vivons donc nous aussi ce passage de la tristesse à la joie, de la peur à la foi, de l’isolement à la com- munion. Que ce qui nous est donné en ce temps de Pâques soit également le fondement de notre vie et de notre agir chrétien. « Le Christ est notre espérance ; il est notre joie » (saint Jean-Paul II)
P. Jean-Philippe Morin
Vicaire général du diocèse de Moulins