13/10/2025
L'abreuvoir par Steve Aganze
Je prends le même chemin. Matins, soirs. Une sente de poussière rouge qui borde l'abreuvoir, fend les herbes hautes et, doucement, se prosterne vers la vallée.
Là, serpente une rivière. Elle ne dort jamais. Elle bouillonne parfois, soupire souvent, mais jamais ne s'arrête. On dit qu'elle naît d'une source immarcescible, cachée quelque part entre le ciel et nos mémoires.
Et ses eaux nourrissent un immense essieu, unique, dont les racines plongent à travers les continents, dont les branches traversent les hémisphères, caressent les toits des palais et les tôles des bidonvilles, les balcons bourgeois et les soupentes oubliées.
Des hommes et des femmes s'approchent de la rivière.
Mais au lieu d'y puiser, ils y versent. Leurs gestes sont lents, méticuleux. Chacun porte sa propre bouteille, remplie d'une eau mystérieuse qu'ils ont eux-mêmes façonnée, distillée goutte à goutte dans le silence de leurs chambres, dans la solitude de leurs chagrins, dans la chaleur d'un souvenir qu'ils ne peuvent oublier :
Terre, ceinte ; Senghor, sa tombe; Le tout continent, son presque rien...
Je prends le même chemin. Matins, soirs. Une sente de poussière rouge qui borde l’abreuvoir, fend les herbes hautes et, doucement, se prosterne vers la