
26/07/2025
L’œuvre cinématographique d’Abdenour Zahzah par le choix esthétique du noir & blanc et donc du clair obscur nous plonge dans l’époque de la guerre d’indépendance en Algérie à Blida au cœur de l’hôpital psychiatrique où FANON exercera son seul post de médecin chef de service après sa formation en médecine à la faculté de Lyon où j’ai moi même exercé sur l’année universitaire 2022-2023 au service de la formation en santé publique de niveau Master.
Le parti pris du film est de scénariser la manifestation de la folie asilaire à l’époque coloniale en insistant sur la porosité des mondes entre le dedans et le dehors. Le film commence d’ailleurs très distinctement sur le tiraillement de l’enfermement et la réponse technicienne d’annihilation de toute résistance motrice comme psychique.
Un choix d’écriture doit être, en effet, un angle didactique de prise sur notre compréhension des événements sociopolitiques. Quoi de plus fort que de scenariser au maximum les rôles interprétés par les patients, femme comme homme pris dans la solitude de leur désarroi, des présumés assassins d’enfants de colons dont la jeunesse nous sidère, de la manifestation du scrupule du tortionnaire, de la résistance du Moudjahidine au cœur de ce lieu qui sonne pour lui comme un refuge paradoxal.
Le patient résiste et le résistant patiente : ils sont tous en quête d’une écoute compréhensive des drames vécus qu’ils ne trouveront que dans la quête en miroir inversé d’un médecin lui-même en guerre contre l’institution asilaire. Guerre du dedans qui le conduit inexorablement à une critique radicale du dehors : la société totale. Les autres médecins ou infirmiers n’étant nullement conscients de leur aliénation, le réalisateur n’en fait donc que peu de cas en dehors de leurs discours ou pratiques stéréotypées (jouer à l’interprète arabe vers le français, nosographier un symptôme pour parachever la supériorité du blanc sur l’autochtone chosifié, jouer aux cartes pour tuer le temps…).
Le réalisateur brouille totalement les places entre résistants et opprimés afin que le spectateur puisse saisir une part non négligeable du fanonisme, celle de la double aliénation aux prises avec les événements qui nous effractent.
Ces manifestations des troubles à l’ordre de la santé mentale en temps de guerre sont si vives que nous sommes saisi au vif d’une pratique psychiatrique révolutionnaire en émergence. La caméra 🎥 nous la rend présente par l’absence de mots, par ces silences et ces plans rapprochés introspectifs sur le visage du Dr. FANON.
L’agresseur est en effet clairement depunt comme un être dont la vulnérabilité est certaine, l’illusion du pouvoir ou l’arbitraire de la violence relève d’une méconnaissance de ce que l’on doit au vivant dans toute ses dimensions. La musique est dans le film d’adbenour ZAHZAH, la « clef de sol », l’élément catarcique qui nous raccroche à la sacralité d’une convivialité qui soigne et qui enjoint à un respect du vivant dans toute sa diversité.
Avec Amal Kateb