03/06/2025
🇬🇦 𝐆𝐚𝐛𝐨𝐧 : Le masque est tombé !
Lorsque le général Brice Clotaire Oligui Nguema a pris le pouvoir par un coup d’État en août 2023, une large frange du peuple gabonais l’a accueilli comme un sauveur. Il incarnait alors la promesse d’une transition honnête, la fin d’un régime gangrené par la corruption, et le début d’une refondation républicaine tant attendue. Deux ans plus t**d, la désillusion est cruelle. Le président élu en avril 2025 ne semble pas incarner un renouveau, mais bien une restauration masquée de l’ancien ordre, au service des intérêts d’un petit cercle.
Un pouvoir reconduit, non conquis.
Avec 94,85 % des suffrages, Brice Oligui Nguema a été "élu" président dans des conditions qui rappellent les scrutins caricaturaux d’autres régimes autoritaires. La nouvelle Constitution, votée dans la précipitation en 2024, a affaibli les contre-pouvoirs. L'ensemble du processus électoral semble avoir été taillé pour une seule ambition : permettre au général-président de transformer une transition militaire en présidence à vie déguisée.
Les mêmes visages, les mêmes dérives.
L’un des plus grands scandales de ce nouveau pouvoir réside dans le casting ministériel et politique. Nombre de figures clés du régime Bongo, connues pour leur compromission et leur incompétence, ont été recyclées sans la moindre explication. Loin de faire le ménage, Brice Oligui gouverne avec l’appareil de l’ancien régime. Il ne s’agit plus d’un changement, mais d’un recyclage habile, maquillé en rupture.
Une dette insoutenable : 80 % du PIB.
Le Gabon est aujourd’hui étranglé par une dette publique estimée à 80 % du PIB. La soutenabilité budgétaire est en péril. Aucune politique économique sérieuse n’a encore été dévoilée pour maîtriser l’endettement ni relancer une croissance créatrice d’emplois. Les recettes pétrolières continuent d’être mal redistribuées, captées par une élite politico-financière, tandis que les investissements productifs peinent à décoller.
Oyima : le symbole du conflit d’intérêts institutionnalisé.
Parmi les nominations les plus choquantes figure celle d’Henri-Claude Oyima, désormais ministre tout en conservant ses fonctions d’administrateur du groupe BGFI, la plus puissante banque du pays. Ce cumul de fonctions, en totale contradiction avec les principes de séparation entre intérêts publics et privés, incarne une forme institutionnalisée de conflit d’intérêts. Il est inconcevable que le ministre en charge de l’économie puisse simultanément veiller aux intérêts d’un groupe bancaire qu’il est censé réguler.
Une justice sous tutelle : l’affaire Sylvia Bongo
Le traitement de l’affaire Sylvia Bongo, ex-Première dame, cristallise l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques. Après avoir été détenue dans des conditions opaques et sans procès équitable, elle a été discrètement exfiltrée en Angola, loin des projecteurs. Cet épisode interroge sur l'indépendance réelle du pouvoir judiciaire et sur l’existence d’un système de deux poids, deux mesures. Pendant que certains proches de l’ancien régime sont sanctionnés pour servir d’exemples, d'autres sont réintégrés sans justification.
Sécurité et services publics : un échec patent.
Le quotidien des Gabonais ne s’est pas amélioré. Insécurité rampante, délestages chroniques, pénuries d’eau, hôpitaux sans médicaments : l’État est toujours aussi défaillant dans ses fonctions essentielles. La SEEG (Société d’Énergie et d’Eau du Gabon), en crise structurelle, reste incapable de fournir les services de base. Aucune réforme de fond n’est engagée. L’État préfère multiplier les cérémonies et les effets d’annonce plutôt que de garantir l’accès à l’électricité ou à l’eau potable.
Un gouvernement pléthorique, sans cap.
Le gouvernement compte plus de 40 ministres, sans compter les ministres délégués et hauts commissaires. Cette inflation institutionnelle traduit l’obsession du contrôle des clientèles plutôt que celle de l’efficacité administrative. Alors que le pays est en grave tension budgétaire, ce train de vie de l’État est une insulte à la population.
Conclusion : une transition confisquée.
Brice Oligui Nguema avait une occasion historique de réconcilier le Gabon avec lui-même. Il avait l’opportunité d’ouvrir un chemin nouveau, transparent, équitable. Mais il semble avoir choisi de préserver les équilibres anciens, tout en se hissant au sommet d’un édifice institutionnel affaibli. L’histoire jugera sévèrement ce rendez-vous manqué. Car au lieu d’inventer le futur, le nouveau pouvoir gabonais semble avoir reconstitué le passé avec d’autres mots, d’autres visages… mais la même logique.