05/04/2025
Hommage à Amadou Bagayoko : Une voix pour les sans-voix
Le vient de perdre l’un de ses plus grands artistes et de ses plus fidèles militants de l’humanité. Amadou Bagayoko, moitié du duo emblématique Amadou et Mariam, s’est éteint ce vendredi à l’âge de 70 ans, des suites d’une maladie. Avec lui disparaît une voix d’or, une âme engagée, un symbole vivant de l’espoir pour les opprimés, les oubliés, les pauvres, les sans-voix.
Amadou n’était pas simplement un chanteur. Il était une mémoire vivante de nos luttes, un troubadour du peuple, un porte-parole des rues de Bamako aux scènes internationales. Sa voix a traversé les frontières, les barrières sociales et linguistiques, pour porter un message universel : la dignité, la paix, la démocratie, et l’amour.
Le griot moderne de la démocratie
Dans ses chansons, Amadou parlait vrai. Il chantait l’injustice sans détour, glorifiait l’État de droit sans naïveté, et appelait sans relâche à un Mali plus uni, plus juste. Il n’était pas de ceux qui chantent pour le pouvoir, mais de ceux qui chantent pour éveiller. Il disait un jour : « Quand on chante pour les pauvres, c’est Dieu qu’on loue. » Cette phrase, comme une devise, guidait son art et sa vie.
À travers des titres comme “Je pense à toi”, “Politic Amagni” ou “La réalité”, il racontait les douleurs du quotidien malien avec poésie, avec tendresse, mais aussi avec une lucidité parfois brutale. Il dénonçait la corruption, le népotisme, l’oubli des campagnes, les enfants sans école, les hôpitaux sans soins.
Une légende musicale aux côtés de Mariam
L’histoire d’Amadou ne se raconte pas sans Mariam. Ensemble, ils ont su transformer leur handicap (ils sont tous deux malvoyants) en force créatrice. Leur rencontre à l’Institut des Jeunes Aveugles de Bamako dans les années 1970 fut le début d’une des plus belles aventures musicales du continent.
En 2004, Un Dimanche à Bamako – produit par Manu Chao – les propulse sur la scène mondiale. C’est plus qu’un album : c’est un hymne à la vie malienne, un éclat de soleil dans l’ombre des douleurs. Depuis, leur musique s’est imposée comme un pont entre les peuples, entre le Nord et le Sud, entre les générations.
Un repère pour toute une génération
Dans les rues de Bamako comme dans les campagnes reculées de Ségou ou Tombouctou, les chansons d’Amadou ont accompagné des enterrements, des mariages, des marches citoyennes, des rassemblements d’étudiants, des grèves d’enseignants. Il chantait la vie, et surtout il chantait notre vie.
Amadou Bagayoko a inspiré des générations d’artistes maliens, africains, et bien au-delà. Il laisse derrière lui un héritage immense, non seulement artistique, mais aussi politique et moral. Dans un Mali où la démocratie est souvent menacée, où la parole libre coûte parfois la vie, Amadou était une lueur, un repère.
Une perte nationale, un deuil universel
À sa femme Mariam, à sa famille, à tous les Maliens et amis du Mali, nous adressons nos condoléances les plus sincères. Mais surtout, nous faisons cette promesse : la voix d’Amadou ne s’éteindra jamais. Elle continuera de résonner dans nos radios, nos cœurs et nos combats. Parce qu’un artiste comme lui ne meurt pas. Il devient immortel dans la mémoire des peuples.
Repose en paix Amadou Bagayoko. Que le ciel t’offre la scène que tu mérites.