17/07/2025
UN MINISTRE DE L'INTÉRIEUR ET SÉCURITÉ EST LÉGALEMENT INCOMPETENT À SUSPENDRE UN GOUVERNEUR DE PROVINCE.
En droit congolais, il est un principe fondamental que nul ne peut exercer une compétence qu’en vertu de la loi, et en stricte conformité avec les prescriptions de la Constitution. Or, en matière de suspension d’un gouverneur de province, le ministre de l’Intérieur ne détient, ni de près ni de loin, la moindre parcelle d’autorité décisionnelle. Ce pouvoir relève exclusivement du Président de la République, seul garant du bon fonctionnement des institutions, conformément à l’article 69 alinéa 2 de la Constitution.
Le gouverneur de province n’est pas un agent de l’administration centrale que l’on suspend par simple décision ministérielle. Il est une autorité politique légitimement investie par le suffrage indirect de l’Assemblée provinciale, en vertu de l’article 198 alinéa 2 la Constitution. À ce titre, son mandat bénéficie d’une protection juridique renforcée, et toute atteinte à son exercice ne peut procéder que d’une décision conforme aux normes supérieures de l’État de droit.
La loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, interprétée à la lumière du principe de subsidiarité et de l’autonomie provinciale (article 2 de la loi précitée ), ne consacre à aucun moment une quelconque compétence de suspension en faveur du ministre. Ce dernier, en tant qu’agent exécutif du pouvoir central, peut tout au plus proposer, informer ou recommander; jamais décider unilatéralement sur la suspension, alors qu'il se limiterait à notifier pareille décision au concerné.
Une mesure de suspension émanant du ministre de l’Intérieur, alors de lui seul, serait donc, en droit, irrémédiablement frappée d’incompétence matérielle. Elle constitue un excès de pouvoir manifeste, une violation du principe de légalité et une immixtion inacceptable dans la sphère des prérogatives constitutionnelles du chef de l’État. Ce que le professeur VUNDUAWE TE PAMAKO appelle excès de pouvoir. Une telle mesure serait nulle de plein droit, inopposable et sans effet juridique, car entachée d’une illégalité radicale.
Définitivement, dans un État respectueux de ses lois, les compétences ne s’improvisent pas, elles se fondent sur le droit. La suspension d’un gouverneur ne peut résulter que d’un acte pris par l’autorité constitutionnellement habilitée. Tout autre procédé serait une dérive grave, contraire à l’esprit et à la lettre de la Constitution, et annihile remarquablement les efforts déployés pour restaurer les principes démocratiques fondateurs de l'État de droits.
A réagi Maître Patrick BAMBA après la suspension de Jacques Kyabula gouverneur du haut Katanga.