
13/09/2025
Dénonciation de l’article 12
1. Un article qui insulte l’histoire du Niger
Le Niger n’est pas né dans une salle de rédaction ni dans les couloirs d’une caserne. Il est le fruit d’un long dialogue entre royaumes, sultanats, cités et chefferies. Aucun d’eux n’a imposé sa langue aux autres : les Songhaï n’ont pas imposé le songhaï, les Kanouri n’ont pas imposé le kanouri, les Peuls n’ont pas imposé le peul, et les Haoussa eux-mêmes n’ont jamais pu faire du haoussa la seule langue d’État. Cet article 12 viole donc un pacte millénaire de coexistence.
2. Une absurdité économique
La force d’un pays moderne ne réside pas dans l’appauvrissement de son patrimoine linguistique mais dans sa valorisation. Le Nigeria, qui partage le haoussa, n’a pas fait ce choix d’exclusion ; au contraire, il multiplie ses langues officielles et nationales pour nourrir son industrie culturelle. L’article 12, au lieu de créer des richesses, appauvrit le Niger en fermant la porte aux industries de traduction, d’édition multilingue et aux opportunités touristiques liées à la diversité culturelle.
3. Une faute géopolitique
Dans un Sahel en quête d’unité, l’article 12 isole le Niger. Comment parler d’intégration avec le Mali et le Burkina, quand on envoie au monde le message que l’on méprise ses propres peuples songhaï, tamasheq, gourmantché, peul et zarma ? C’est offrir un terrain de discorde gratuit à ceux qui veulent semer la division.
4. Une incohérence morale
Les partisans de l’article 12 prétendent défendre l’identité africaine contre la France, mais ils copient servilement le jacobinisme français. Ils rejettent la pluralité millénaire de nos royaumes africains pour embrasser un modèle colonial qu’ils prétendent combattre. N’est-ce pas l’hypocrisie à son plus haut degré ?
5. Un test dangereux
Si aujourd’hui on peut exclure des langues au nom d’une majorité, demain ce seront des ethnies, des régions, des religions ou des individus qui pourront être exclus au nom du nombre.
Mouryar Matassa