Cabinet Intégré des Relations Internationales.

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30/11/2025

Violence politique en Afrique : un mal ancien qui se réinvente

La violence en politique demeure l’une des réalités les plus persistantes du paysage africain, des premières années d’indépendance jusqu’à aujourd’hui. Malgré les progrès démocratiques observés depuis les années 1990, le recours à la force, à l’intimidation et à la répression reste un instrument privilégié pour contrôler la vie publique et neutraliser la concurrence politique.
Un héritage autoritaire toujours présent
À la sortie de la période coloniale, de nombreux régimes africains ont rapidement basculé vers des gouvernances autoritaires. Faiblesse de l’État, compétition pour le pouvoir et absence d’alternance réelle ont encouragé des pratiques politiques fondées sur la coercition.
Dans cette logique, la diversité ethnique et sociale a souvent été utilisée pour justifier la centralisation extrême du pouvoir et pour légitimer la répression de l’opposition. Résultat : emprisonnements arbitraires, procès politiques, torture, exécutions sommaires et disparitions forcées ont marqué les premières décennies des indépendances.
Dans certains cas, la brutalité a atteint des niveaux inouïs, comme la profanation de tombes de proches d’opposants, une stratégie destinée à briser psychologiquement les familles et à terroriser l’opinion.
Une répression qui se banalise
Au-delà des épisodes historiques spectaculaires, la violence politique s’est installée dans le quotidien. Dans plusieurs pays, toute manifestation pacifique devient prétexte à une intervention des forces de sécurité. Les revendications citoyennes, même légitimes, sont souvent étouffées par des arrestations massives, des brutalités policières ou des interdictions injustifiées.
De nombreux opposants, militants et journalistes vivent dans une insécurité permanente : refus de passeports, interdiction de voyager, pressions administratives, harcèlement économique ou professionnel. Ces formes de violence discrète, moins visibles, n’en sont pas moins destructrices.
Même dans les démocraties, une violence politique plus subtile
Les pays considérés comme démocratiques ne sont pas épargnés. Les méthodes ont simplement changé de forme. Là où les dictatures procédaient par répression brute, certains régimes démocratiques recourent à des moyens plus sophistiqués :
tentatives de dissolution de partis,
obstacles juridiques contre des candidats,
manipulations médiatiques,
calomnies sur les réseaux sociaux,
pressions contre la presse indépendante,
achat de consciences ou cooptation d’acteurs influents.
Cette violence « douce » permet de verrouiller le champ politique sans recourir au sang, mais en obtenant les mêmes résultats : réduire l’espace de liberté et étouffer le pluralisme.
Un problème structurel qui interroge l’avenir
La persistance de la violence politique en Afrique renvoie à des causes profondes : institutions fragiles, pouvoir personnalisé, compétition pour les ressources de l’État, instrumentalisation des identités, absence de culture démocratique solide et ingérences extérieures intéressées.
Face à ces défis, la démocratisation ne peut se limiter aux élections. Elle doit impliquer une véritable transformation des pratiques politiques, un renforcement de l’État de droit et une protection effective des libertés publiques.
La stabilité durable du continent dépendra de la capacité des États africains à rompre avec la logique de domination par la force et à faire émerger une culture politique fondée sur le dialogue, la transparence, la responsabilité et le respect de l’opposition.

29/11/2025

Élections en Afrique : l’heure de vérité

Depuis plus de trente ans, le continent africain organise des élections régulières, adopte des Constitutions modernisées et affiche des institutions électorales dites indépendantes. Pourtant, à chaque cycle électoral ou presque, le scénario se répète : accusations de fraude, contestations massives, violences meurtrières. Côte d’Ivoire, Kenya, Gabon, RDC : la liste est longue, trop longue.
La vérité est simple : ce ne sont pas les élections qui manquent en Afrique, mais leur crédibilité.
La démocratie de façade a atteint ses limites
Depuis La Baule, les régimes ont appris à tenir les formes sans respecter le fond.
On vote, on dépouille, on proclame des résultats ; mais derrière cette façade électorale, le jeu est profondément biaisé.
Les listes électorales sont manipulées, les découpages orientés, l'administration territoriale instrumentalisée. Dans certains pays, le nombre d’électeurs inscrits dépasse la population nationale, un symptôme d’un mal politique plus profond.
Ce que les citoyens constatent, c’est que le pouvoir organise lui-même les règles du jeu et se proclame ensuite vainqueur.
Comment demander à des peuples d’accepter des résultats qu’ils perçoivent comme fabriqués ?
Des institutions trop faibles pour protéger le vote
Partout, on parle de commissions électorales indépendantes. Dans les faits, elles sont dépendantes de l’exécutif dans leurs nominations, dans leur financement et dans leur marge de manœuvre.
Elles proclament des résultats mais n’enquêtent pas sur les irrégularités.
Quant à la justice, elle est trop souvent un prolongement du pouvoir. Dans ces conditions, les recours ne sont pas des solutions, mais des formalités qui donnent un vernis légal à des décisions déjà écrites.
Une justice capturée n’éteint pas les conflits électoraux : elle les aggrave.
Le poison identitaire face au vide institutionnel
Lorsque les règles sont faussées, les candidats ne se battent plus pour convaincre : ils mobilisent leurs appartenances ethniques, régionales ou religieuses.
Le vote devient un réflexe communautaire, non une expression citoyenne.
Le politique, incapable de garantir une compétition loyale, ouvre la porte aux tensions identitaires.
Et le continent continue d’en payer le prix, parfois en vies humaines.
La violence électorale n’est pas une fatalité africaine
Répétons-le fermement : la violence n’est pas culturelle, elle est institutionnelle.
Elle naît là où les règles sont bafouées, où la justice est faible, où l’administration est instrumentalisée.
À chaque fois que l’on vole le droit de vote, on crée les conditions d’une explosion.
Et tant que les gouvernants privilégieront leur survie politique au détriment de l’intégrité du processus électoral, les crises post-électorales continueront d’empoisonner la stabilité du continent.
Il est temps de réhabiliter le sens du suffrage
L’Afrique n’a pas besoin de plus d’élections. Elle a besoin d’élections crédibles.
Cela passe par :
des commissions électorales réellement indépendantes ;
une justice électorale robuste ;
un audit transparent et permanent des listes ;
l’égalité de traitement entre candidats ;
la fin de l’usage partisan de l’État.
Le suffrage n’est pas un rituel : c’est un contrat.
Quand ce contrat est trahi, la société se fracture.

Conclusion : la démocratie africaine peut encore tenir sa promesse
Le continent n’est pas condamné à l’instabilité.
Il est condamné à l’instabilité seulement si ses dirigeants refusent d’assainir le jeu démocratique.
L’Afrique ne doit plus se contenter de voter : elle doit se donner les moyens que le vote compte réellement.
C’est à ce prix que la démocratie cessera d’être une illusion pour devenir un instrument de justice, de stabilité et de dignité collective.

Dr Famara SANE

1- AFRIQUE DE L'OUEST : COMMENT RENFORCER LE PASTORALISME FACE FACE AUX DÉFIS SÉCURITAIRES AU SAHEL ?2- SÉCURITÉ EN AFRI...
19/11/2025

1- AFRIQUE DE L'OUEST : COMMENT RENFORCER LE PASTORALISME FACE FACE AUX DÉFIS SÉCURITAIRES AU SAHEL ?

2- SÉCURITÉ EN AFRIQUE : QUELLE CONTRIBUTION DES COMMUNAUTÉS À LA GOUVERNANCE SÉCURITAIRE ?
Medi1TV Diallo Amadou

..Afrique de l'Ouest : comment renforcer le pastoralisme face aux défis sécuritaires du Sahel ?

14/11/2025

Crise au sommet de l’État : entre Diomaye et Sonko, la dualité d’un pouvoir à deux visages

Le Sénégal vit un moment charnière de sa trajectoire politique. À peine quelques mois après l’alternance historique de mars 2024, le pays semble déjà traversé par des tensions internes au sommet de l’État. La cohabitation entre le Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko révèle, au‑delà des apparences de cohésion, une dualité de légitimités qui fragilise la lisibilité du pouvoir et interroge la cohérence de la gouvernance nationale.

Les causes profondes : la rencontre entre deux légitimités

L’histoire retiendra que Diomaye Faye a accédé au pouvoir sur la base d’une délégation symbolique de légitimité. Empêché de se présenter, Ousmane Sonko a transféré à son compagnon d’infortune la mission de conduire le projet de rupture. C’est cette alliance qui a permis une victoire nette, mais qui porte en elle‑même les germes d’une ambivalence : un président élu mais adossé à la popularité d’un autre homme.

Dès son installation le 2 avril 2024, Diomaye Faye a cherché à asseoir son autorité, à redonner au pouvoir présidentiel son autonomie et à incarner la stabilité institutionnelle. Sonko, nommé Premier ministre trois jours plus t**d, a choisi de prolonger son discours de combat, de dénoncer l’héritage du néocolonialisme et d’imposer un rythme réformiste plus radical. Entre la prudence présidentielle et la fougue militante, le contraste est devenu palpable.

Les dynamiques actuelles : entre cohésion affichée et tensions latentes

Plusieurs signes attestent de cette dualité de gouvernance.
Les divergences de ton se multiplient :

Sur la monnaie et la souveraineté économique, Diomaye prône la concertation régionale ; Sonko évoque une sortie rapide du franc CFA.

En matière de coopération internationale, le Président privilégie la diplomatie de respect mutuel ; le Premier ministre adopte une rhétorique de dénonciation directe.

Même à l’intérieur du gouvernement, des loyautés se partagent : certains ministres s’identifient au chef de l’État, d’autres au leader historique de Pastef.

Ce décalage n’est pas encore une crise ouverte, mais il traduit une gouvernance bicéphale non coordonnée, où les centres d’impulsion du pouvoir se superposent sans se fondre.

Les enjeux véritables : pouvoir, image et gouvernabilité

Derrière ces tensions se cachent des enjeux multiples.

Pour Diomaye Faye, l’enjeu est de consolider sa légitimité propre et de montrer qu’il est maître du jeu, sans renier l’héritage de Sonko.

Pour Sonko, il s’agit de préserver sa base populaire, de rester l’âme du projet de rupture, tout en évitant d’être institutionnellement neutralisé.

Pour le pays, le risque est réel : si cette dualité devient rivalité, elle peut affaiblir la coordination de l’État, compromettre la confiance des partenaires internationaux et ralentir les réformes attendues par les Sénégalais. L’expérience montre que lorsqu’un régime parle à deux voix, c’est la nation entière qui perd sa direction.

Ce qu’il faut faire pour éviter la rupture

Il est encore temps d’éviter une crise au sommet. Mais cela exige un sursaut de lucidité et de responsabilité historique.

Clarifier les rôles : le Président doit incarner la continuité de l’État ; le Premier ministre, la mise en œuvre du programme gouvernemental. Aucun discours politique ne doit brouiller cette ligne.

Institutionnaliser un dialogue stratégique régulier entre la Présidence et la Primature pour anticiper les désaccords et harmoniser les priorités.

Unifier la communication gouvernementale : la parole publique doit être une, claire et lisible.

Préserver la cohésion du camp de la majorité : les rivalités internes ne servent que les adversaires extérieurs au projet de rupture.

Gouverner à deux têtes n’est possible que si l’intérêt national prime sur les egos et les agendas personnels. C’est à ce prix que le Sénégal pourra éviter de revivre les fractures du passé, celles de 1962 entre Senghor et Mamadou Dia, où la dualité s’était transformée en affrontement ouvert.

Le tandem Diomaye–Sonko symbolise l’espoir d’une refondation politique, mais il porte aussi les fragilités d’une révolution arrivée trop vite au pouvoir. Si les deux hommes parviennent à dépasser les calculs et les susceptibilités, le Sénégal pourra inaugurer une ère de gouvernance intelligente et solidaire.
Mais si la rivalité prend le pas sur la complémentarité, le rêve de rupture pourrait se muer en désillusion nationale.
L’histoire ne pardonne jamais aux dirigeants qui confondent victoire. politique et conquête du pouvoir réel. Le Sénégal mérite une direction claire, unie et visionnaire.

Les menaces de Donald Trump contre le Nigeria :  entre géopolitique, religion et recomposition stratégique mondialeL’ann...
06/11/2025

Les menaces de Donald Trump contre le Nigeria : entre géopolitique, religion et recomposition stratégique mondiale

L’annonce tonitruante de Donald Trump, menaçant d’une intervention militaire au Nigeria au motif que le gouvernement « tolérerait les meurtres de chrétiens », a suscité une onde de choc diplomatique. Ces propos, relayés sur sa plateforme Truth Social, traduisent une rhétorique messianique déjà familière chez le président américain, où la religion se mêle étroitement aux calculs électoraux et géopolitiques. Pourtant, une lecture froide des réalités nigérianes et régionales révèle une manipulation dangereuse des faits et des émotions collectives.

Une lecture biaisée d’un conflit complexe

Le Nigeria, pays de plus de 233 millions d’habitants, partagé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne, est un État d’une complexité religieuse et ethnique rare. Les violences qui frappent certaines régions du pays, notamment au Nord-Est avec Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), ne peuvent être réduites à un affrontement religieux.

Les terroristes et bandits armés y tuent plus de musulmans que de chrétiens, comme l’ont rappelé plusieurs observateurs, dont Massad Boulos, conseiller pour l’Afrique de Donald Trump. Ces groupes s’en prennent indistinctement à tous ceux qui s’opposent à leur idéologie. Les populations musulmanes du Nigeria, du Niger, du Cameroun, du Tchad ou du Mali sont d’ailleurs les premières victimes de cette barbarie.

Morale sélective et stratégie politique dans la posture américaine

Pourquoi, alors, Donald Trump prétend-il défendre les chrétiens du Nigeria ?
La réponse se trouve sans doute dans la dimension électoraliste et idéologique de sa communication. Aux États-Unis, l’électorat évangélique blanc constitue une base cruciale pour le camp républicain. En amplifiant le récit d’un « génocide chrétien » en Afrique, Trump s’assure un soutien fervent de cette frange, tout en consolidant une vision manichéenne du monde : l’Occident chrétien face à un islam présenté comme source de menace.

Mais cette posture interroge. Pourquoi le même Donald Trump ne s’indigne-t-il pas du sort des Ouïghours musulmans en Chine, persécutés dans des camps d’internement ? Pourquoi ne mentionne-t-il jamais les Rohingya en Birmanie, ni l’islamophobie croissante en Europe, notamment dans certains pays alliés des États-Unis ? Cette moralité sélective révèle une diplomatie fondée non sur des valeurs universelles, mais sur l’instrumentalisation politique de la religion.

Le Nigeria un pivot géostratégique en mutation

Sur le plan géopolitique, les propos de Trump risquent d’avoir un effet inverse à celui recherché.
Le Nigeria, première puissance militaire d’Afrique de l’Ouest (avec près de 230 000 militaires actifs et 50 000 paramilitaires), n’est pas un État faible ni un simple pion sur l’échiquier international. Face à cette menace de Washington, Abuja pourrait accélérer son rapprochement stratégique avec la Russie ou la Chine, deux puissances en quête d’alliés africains face à l’hégémonie occidentale.

Ce repositionnement est d’autant plus plausible que le Nigeria, bien qu’ancien partenaire privilégié des États-Unis, voit son économie décliner et sa position régionale contestée par l’Afrique du Sud. Dans ce contexte, une pression américaine jugée arrogante pourrait renforcer les tendances souverainistes déjà présentes dans les cercles politiques nigérians.

Un risque d’embrasement diplomatique

Le ministre des Affaires étrangères, Yusuf Tuggar, a répliqué avec fermeté, affirmant que le Nigeria « ne tolère aucune persécution religieuse » et rappelant que le pays est guidé par sa Constitution garantissant la liberté de culte. En brandissant le spectre d’une intervention militaire, Washington ravive des souvenirs douloureux : ceux d’un monde où les grandes puissances se permettaient d’imposer leur vision morale et politique par la force.

Le parallèle fait par le ministre nigérian avec le Soudan est particulièrement pertinent. L’incitation à la partition religieuse ou ethnique, comme on l’a vu à Khartoum ou à Djouba, n’a conduit qu’à des tragédies. En attisant la fibre religieuse au Nigeria, Trump joue avec le feu : il fragilise un équilibre interne déjà précaire et pourrait contribuer à la déstabilisation d’une région stratégique pour l’ensemble du continent.

L’épisode Trump-Nigeria dépasse la simple polémique verbale, il illustre la crise morale de la diplomatie américaine, où la religion devient un instrument de puissance et d’influence. L’Afrique, longtemps considérée comme un terrain de jeu entre grandes puissances, ne peut plus se permettre d’être l’objet de ce type de discours simplificateurs et incendiaires. Ce que l’Afrique attend, ce n’est pas une nouvelle croisade morale, mais un partenariat fondé sur le respect mutuel, la vérité des faits et la souveraineté des peuples.

Diallo Amadou Spécialiste en relations internationales
Kaila ( Université Cheikh Anta Diop de Dakar )

06/11/2025

Souveraineté en trompe-l’œil : quand les présidents africains confisquent la démocratie

Alors que le discours sur la souveraineté africaine s’impose dans les forums, les médias et les chancelleries, de nombreux pays du continent continuent d’être minés par des élections contestées, des constitutions manipulées et des dirigeants décidés à s’éterniser au pouvoir. Entre l’aspiration des peuples à l’autonomie et la volonté des élites à tout contrôler, l’Afrique traverse une crise silencieuse de la légitimité politique.

Une souveraineté proclamée, mais confisquée

De la Côte d’Ivoire au Cameroun, en passant par le Tchad ou le Congo, les scrutins récents ont souvent davantage servi à légitimer des pouvoirs en place qu’à consacrer la volonté populaire. Dans beaucoup de pays, le vote n’est plus l’expression d’une alternance pacifique, mais une formalité administrative orchestrée par le pouvoir.
Les institutions électorales, censées être indépendantes, deviennent des instruments de contrôle politique. Les oppositions sont affaiblies, la justice instrumentalisée, et les constitutions révisées à la demande des présidents en exercice. Cette situation crée une fracture profonde entre les citoyens et l’État, alimentant la méfiance et le désenchantement démocratique.

Le paradoxe du discours souverainiste

Ironie de l’histoire : au moment même où les dirigeants africains proclament haut et fort la souveraineté du continent, celle-ci s’arrête souvent aux portes du palais présidentiel.
Le concept de souveraineté, pourtant porteur d’une promesse d’émancipation, devient un outil rhétorique pour justifier la mainmise sur le pouvoir. On réclame l’indépendance vis-à-vis de l’Occident tout en reproduisant des modèles politiques autoritaires, souvent soutenus par de nouvelles puissances émergentes ou par les mêmes institutions financières internationales dont on prétend se libérer.

Ainsi, la souveraineté se réduit à un discours défensif, déconnecté de la réalité sociale et économique des peuples. Car un État n’est souverain que lorsque ses citoyens le sont aussi, dans leurs droits, dans leur vote, dans leur liberté de choix.

La désillusion démocratique et le retour du sabre

Cette confiscation du pouvoir a une conséquence directe : le retour du militarisme politique. Au Mali, au Burkina Faso, au Niger, au Gabon, les coups d’État ont été salués par une partie des populations, non par nostalgie de l’uniforme, mais par rejet d’un système politique devenu stérile.
Les militaires se présentent comme les « correcteurs » d’une démocratie trahie. Pourtant, si leur arrivée au pouvoir traduit une colère légitime, elle ne garantit pas pour autant une rupture durable. Le danger est grand de voir se substituer un autoritarisme en treillis à un autoritarisme en costume.

Refonder la souveraineté, pas la proclamer

L’Afrique n’a pas besoin d’une souveraineté de façade, mais d’une souveraineté vécue : celle qui s’incarne dans des institutions fortes, des constitutions respectées, une justice indépendante, des élections crédibles et une économie qui ne dépend pas de la rente ou de l’aide extérieure.
C’est dans la confiance des peuples que se fonde la légitimité des États, et non dans la durée d’un mandat présidentiel.

Une souveraineté par le peuple, pour le peuple

La véritable souveraineté africaine ne se mesurera ni dans les discours enflammés, ni dans les postures de défi envers l’étranger, mais dans la capacité des dirigeants à rendre des comptes à leurs citoyens.
C’est là que se joue la renaissance du continent : dans la construction d’États responsables, transparents et justes.
Sans cela, la souveraineté restera un mirage, et les élections, un simple rituel pour valider l’immobilisme.

02/11/2025

La diplomatie peut-elle être source d’espoir entre le Mali et le Sénégal, dans un contexte critique de menace terroriste ?

Par le Pr. Famara SANE, historien et spécialiste en relations internationales, diplomatie et gouvernance.

Alors que la menace terroriste se renforce dans le Sahel, les États de la région sont confrontés à une urgence de coopération diplomatique et sécuritaire. Entre le Mali et le Sénégal, deux pays liés par l’histoire, la géographie et les peuples, la diplomatie pourrait redevenir un instrument de confiance et d’action collective pour éviter l’extension de l’instabilité vers la côte ouest-africaine.

Le contexte d’une menace qui redéfinit les équilibres régionaux

La zone sahélo-saharienne vit depuis plus d’une décennie une recomposition profonde de ses équilibres politiques et sécuritaires. Le retrait des forces étrangères, la montée des armées nationales et la résurgence des alliances régionales — notamment à travers l’Alliance des États du Sahel (AES) — traduisent une volonté d’autonomie stratégique. Mais cette reconfiguration s’accompagne de nouvelles fractures diplomatiques.

Le Sénégal, pays historiquement stable et pivot de la CEDEAO, observe avec inquiétude la radicalisation de certains espaces frontaliers et l’effritement des mécanismes classiques de coopération sécuritaire. Le Mali, en revanche, se recentre sur une logique souverainiste et de rupture avec les dispositifs multilatéraux jugés inefficaces. Ce décalage stratégique nourrit une méfiance qu’il faut impérativement transformer en opportunité de dialogue.

Diplomatie et voisinage stratégique : entre prudence et responsabilité partagée

La relation entre Bamako et Dakar ne peut être envisagée sous le seul prisme politique. Elle est avant tout une relation de sécurité partagée, fondée sur la porosité des frontières, les échanges économiques et les dynamiques socioculturelles. La frontière commune de près de 400 kilomètres n’est pas seulement un espace géographique : c’est un trait d’union entre les populations mandingues, peules et soninkées qui partagent les mêmes vulnérabilités.

Dans ce contexte, la diplomatie bilatérale doit redevenir un instrument de prévention, non pas de réaction. Le Sénégal, par sa tradition d’équilibre et son rôle moteur dans la sous-région, peut impulser une médiation discrète mais ferme, axée sur la sécurité collective, la stabilisation frontalière et la coordination des renseignements. Cette posture proactive renforcerait la crédibilité régionale de Dakar tout en contribuant à une meilleure résilience du Mali face aux réseaux terroristes transnationaux.

Une diplomatie de sécurité et de développement concerté

La stabilité ne se décrète pas uniquement par les armes. Elle se construit par la diplomatie du développement, celle qui investit dans les infrastructures frontalières, l’éducation, la jeunesse et les projets transnationaux.

L’avenir des relations Mali–Sénégal passe donc par une diplomatie fonctionnelle, articulée autour de trois priorités :

1. La sécurité concertée : partage des renseignements, patrouilles conjointes, mécanismes d’alerte précoce.

2. Le développement transfrontalier : zones économiques intégrées, corridors sécurisés, projets agricoles partagés.

3. La diplomatie culturelle et communautaire : relance des jumelages, des dialogues religieux et des initiatives citoyennes de paix.

Ces dynamiques peuvent être soutenues par les organisations régionales (CEDEAO, UA) et les partenaires internationaux, à condition de respecter les souverainetés et d’appuyer les efforts endogènes de stabilisation.

Le rôle du Sénégal : leadership de confiance et vigilance géostratégique

Le Sénégal, en tant que nation charnière entre le Maghreb, le Sahel et l’Atlantique, doit incarner une diplomatie d’équilibre — ni d’ingérence, ni d’indifférence. Sa crédibilité historique en matière de médiation (Casamance, Gambie, Guinée-Bissau) lui confère un rôle naturel de facilitateur.

Il ne s’agit pas de cautionner les choix politiques d’un État voisin, mais de prévenir une dérive régionale qui pourrait menacer la stabilité sénégalaise elle-même. L’infiltration progressive des cellules terroristes dans les zones frontalières, la circulation d’armes légères et les tensions intercommunautaires sont autant de signaux faibles qui exigent une réponse diplomatique coordonnée.

Pour une diplomatie de la vigilance et de la solidarité sahélienne

Face à la menace terroriste, aucun État n’est une île. La sécurité du Sénégal dépend en grande partie de la stabilité du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Dans ce sens, la diplomatie doit redevenir le premier rempart, non seulement pour désamorcer les tensions, mais aussi pour construire une vision sahélienne de la paix, inclusive et durable.

Il est temps de réinventer une diplomatie africaine de proximité, où les ministères des Affaires étrangères, les armées, les chercheurs, les leaders religieux et les acteurs communautaires participent ensemble à la prévention de la violence.

Cette démarche proactive serait un signal fort envoyé à la communauté internationale : l’Afrique de l’Ouest ne veut pas subir le terrorisme, elle veut le vaincre par la coopération, la solidarité et la lucidité politique.

Conclusion : la diplomatie comme rempart et boussole

Entre le Mali et le Sénégal, la diplomatie doit redevenir la boussole du réalisme et de l’espoir. Dans un environnement sahélien fragmenté, le dialogue politique, la coopération sécuritaire et la diplomatie préventive sont les seuls remparts contre la contagion terroriste.

Il appartient donc aux dirigeants des deux pays de dépasser les malentendus politiques pour construire une alliance de survie régionale, fondée sur la confiance, la concertation et la responsabilité partagée.

🇸🇳🇲🇱Sénégal–Mali : la Diplomatie au service de la Stabilité Régionale🌍 Alors que la sous-région ouest-africaine traverse...
25/10/2025

🇸🇳🇲🇱Sénégal–Mali : la Diplomatie au service de la Stabilité Régionale

🌍 Alors que la sous-région ouest-africaine traverse une période d’incertitude marquée par des tensions sécuritaires 🔥 et économiques 📉, il devient crucial pour le Sénégal de jouer pleinement sa carte diplomatique auprès du Mali.
Cette approche, loin d’être un simple geste de solidarité 🤝, pourrait renforcer l’aura du Sénégal sur la scène régionale tout en consolidant sa propre économique et sécuritaire .
⛽ Depuis plusieurs semaines, le Mali fait face à une crise profonde.

Des groupes terroristes 💣 y multiplient les attaques, allant jusqu’à incendier des citernes de carburant, provoquant une pénurie sans précédent dans tout le pays, notamment à 🏙️.
Les conséquences sont lourdes : transports paralysés 🚌, universités fermées 🎓, hausse vertigineuse des prix 💸, et un ralentissement économique notable ⚠️.

Le blocus imposé sur certaines routes, comme en témoigne le cas de , illustre la gravité de la situation 🚫.

Dans ce contexte, le fort de la modernisation de son armée 🪖 au cours de la dernière décennie a un rôle stratégique à jouer.
En facilitant l’acheminement sécurisé des ressources essentielles 🚛💧 notamment le carburant ⛽ et les importations transitant par le Port Autonome de Dakar L'Officielle ⚓ vers le Mali, le Sénégal pourrait contribuer non seulement à stabiliser un en détresse, mais aussi à redynamiser son propre port, véritable poumon économique national 🌐.

📌 Rappelons que le Mali, désormais membre de l’ (AES) et actuel président de cette organisation, n’appartient plus à la ⚠️.

Cette nouvelle réalité géopolitique 🧭 appelle le Sénégal à redéfinir sa diplomatie régionale 🌍 en tenant compte des nouveaux rapports de force ⚖️.
Un rapprochement pragmatique et coopératif entre et permettrait d’asseoir une sécurité partagée 🛡️ le long de la frontière sénégalo-malienne, tout en consolidant la position stratégique du port de Dakar comme corridor vital pour le commerce sahélien 🚢.

En somme, la stabilité du Mali est aussi celle du Sénégal. Et dans une région où les équilibres sont fragiles , la reste l’arme la plus efficace pour bâtir la sécurité et la prospérité🌾

✍️ Par Diallo Amadou
Spécialiste en relations internationales
[email protected]

Bassirou Diomaye Faye Présidence de la République du Sénégal Primature du Sénégal Primature du Mali

25/10/2025
25/10/2025

✋️En trois ans, le paiera plus du triple de ce qu’il a payé en onze ans.

🇸🇳Dette publique du Sénégal : Soutenable, mais pour qui ?

Dr. Ndongo Samba Sylla a partagé sur son compte Facebook un article de Reuters intitulé :
🔗 Senegal debt servicing projections for years ahead rise sharply, document shows { https://lnkd.in/edeTAuRt

Selon les informations transmises au par le sénégalais, le pays devra assurer un service de la dette totale de 14 870 milliards de francs CFA (soit environ 26,3 milliards USD) entre 2026 et 2028 :

✔️2026 : 5 490 milliards CFA

✔️2027 : 4 410 milliards CFA

✔️2028 : 4 970 milliards CFA

Pour rappel, le service de la publique extérieure (PPG) du Sénégal sur la période 2012–2023 s’élevait à 7,6 milliards USD, selon la Banque mondiale.
Autrement dit, en trois ans, le Sénégal paiera plus du triple de ce qu’il a payé en onze ans.
💰 Une dette « soutenable », vraiment ❓️

Les internationales parleront sans doute de « dette soutenable », en s’appuyant sur des ratios rassurants.
Mais cette soutenabilité est asymétrique : elle rassure les créanciers, pas les citoyens.

Soutenable pour les , car les remboursements seront assurés, même au prix d’ajustements douloureux.

Insoutenable pour les , car chaque franc consacré au service de la dette est un franc en moins pour la santé, l’éducation, ou la alimentaire.

Fragile pour l’économie, car la dette est majoritairement libellée en étrangères, exposant le pays à un risque de change et de dépendance prolongée.

🌍 Une lecture géopolitique s’impose
Derrière les chiffres, il y a un rapport de forces.
La dette devient un instrument de contrôle économique et politique, une manière subtile de restreindre la marge de souveraineté des États africains, surtout dans un contexte où les financements alternatifs (BRICS, fonds arabes, Chine) rebattent les cartes.

La vraie question n’est donc plus « la dette est-elle soutenable ? », mais bien :
👉🏽 soutenons-nous encore notre propre modèle de développement ?

Une dette qui sacrifie la justice sociale et l’avenir des jeunes générations n’est pas soutenable.
Elle est simplement supportée par les peuples.

📘 Diallo Amadou
Spécialiste en relations internationales

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